Aujourd’hui c’est LA journée (ben oui…) : nous allons traverser la Vallée de la Mort !
Je suis souvent allée sur le web en juillet consulter les sites météo pour m’informer des douces températures du lieu : 49, 50, 52°C… et je me suis souvent demandée comment on allait pouvoir survivre à ça !
Surtout que ce matin nous traversons Las Vegas sous le soleil, les façades des bâtiments étincellent en reflétant le ciel bleu, on croirait voir les faux plafonds des hôtels ! Rien de comparable avec le triste aperçu de notre arrivée...
Nous quittons l’endroit avec un sentiment mitigé, répulsion provoquée par l’alignement monstrueux des machines à sous et la profusion de décors superficiels, stupéfaction devant le spectacle trucculent de la vie nocturne, émerveillement face aux parfaites reconstitutions des monuments célèbres du monde entier, à l’image d’une ville à l’histoire ambiguë, fondée par des mormons puis développée par la mafia, métropole lumineuse et multicolore à la végétation luxuriante entourée de paysages désertiques, caillouteux et poussiéreux… bref, une ville totalement en trompe-l’œil et qui assume superbement son indécence !
Ce matin nous avons bénéficié d’un petit-déjeuner chaud (omelette, saucisse, lard, pomme de terre…) sûrement en prévision du froid qui nous attend dans la Vallée de la Mort...
Avant de quitter définitivement Las Vegas, nous nous arrêtons dans un Truck Stop pour aller admirer quelques rutilants monstres mécaniques décorés (ça nous change de l’état de notre car…), ce sont de véritables mobil homes pour leurs chauffeurs qui les surveillent comme des trésors (attention à ne pas s’en approcher de trop près… y’en a même qui mordent !)
En route pour la Death Valley, à 200 km au nord-ouest de Las Vegas, et pendant que les jeunes jouent aux cartes au fond du car, Philippe nous donne quelques infos sur l’endroit que nous allons traverser (j’ai mon petit carnet, je note tout !). Nous apprenons ainsi que le record de température est de 56,7°C à l’ombre (ça ne me rassure pas du tout, surtout qu’il n’y a pas d’ombre !) et qu’on peut y perdre jusqu’à 1 litre d’eau de sueur par heure (à boire !!!) Par contre, les orages y sont violents et peuvent détruire les routes, comme cela a été le cas l’an dernier (la nouvelle route n’est terminée que depuis 3 mois). Bref, un endroit sympa comme les noms des points de vue l’indiquent : Dante’s view, Furnace Creek (le ruisseau de la forge), Badwater (mauvaises eaux), Devil’s Golf Cours (parcours de golf du diable), Funeral mountains (montagnes funèbres)...
Nous nous arrêtons à Zabriskie Point pour profiter d’un panorama extraordinaire sur la diversité des paysages de la vallée : montagnes noires, lacs de sel blancs, roches multicolores, tantôt jaunes, roses et rouges (fer), tantôt vertes (mica) ou pourpres (manganèse), on comprend qu’il y ait un point de vue qui s’appelle Artists Palette !
C’est encore une fois magnifique, va-t-on supporter ça longtemps ?
Ce qui est vraiment insupportable, par contre, c’est la chaleur sèche qui nous enveloppe lorsque nous sortons du car : difficile de respirer, il nous faut grimper un rocher, pour profiter du panorama, nous arrivons, pff, en haut, pff, complètement, pff, essoufflés !
Ancien lac salé, la vallée est en effet aujourd’hui un parc de zone aride qui contient le plus grand relief désertique de la partie continentale des Etas-Unis (13500km²).
Le parc est séparé de l’océan Pacifique par 5 chaînes de montagnes qui assèchent complètement les entrées d'air océanique chargées d'humidité.
Endroit de tous les contrastes, le point le plus bas de la Vallée de la Mort est situé à moins 86 mètres en dessous du niveau de la mer alors que le Telescope Peak, enneigé l’hiver, se dresse sur les montagnes environnantes à plus de 3 000 mètres d'altitude !
C’est là que nous rencontrons des touristes français qui font le voyage dans le sens inverse et qui, eux, apprécient cette suffocante chaleur tellement ils ont souffert du froid à San Francisco où les températures n’ont pas excédé 13°C pendant leur séjour… sglurp, a-t-on emporté suffisamment de pulls et de pantalons ?
Nous reprenons le car pour nous rendre à Furnace Creek où l’on peut trouver, outre le centre d'informations pour touristes, un poste à essence, deux hôtels, un terrain de golf, un petit musée et un bureau de poste…
Là, nous apprendrons grâce au thermomètre extérieur du Visitor Center qu’il ne fait aujourd’hui que 41°C… (oui, mais à l’ombre !)
Nous sommes surpris de découvrir que le "ruisseau de la fournaise" est plutôt une luxuriante oasis de palmiers en plein coeur de la vallée…
Car malgré la rudesse et la sévérité de l'environnement, plus de 900 espèces de plantes poussent dans le parc : il paraît même qu’au printemps, les fleurs de la région transforment le désert en un vaste jardin !
De même, certaines espèces animales se sont aussi adaptées à cet environnement : mouflons, coyotes, serpents à sonnette (bon, je ne vais éviter d’aller me promener loin toute seule… de toutes façons, c’est l’heure du déjeuner !)
Au cours du repas, Philippe nous conseille malicieusement de goûter la Root Beer, sorte de soda mousseux à base de houblon et d'extraits de vanille, de réglisse, de sassafras, de gigembre, d’écorce de bouleau et de diverses autres plantes… ça sonne bien comme ça mais en réalité, cette boisson très prisée par les petits américains est une horreur : le même goût que l’infâme chewing-gum acheté à Kanab ! Selon moi cette boisson aurait plus sa place dans une armoire à pharmacie que dans un restau mais bon… on ne nous y reprendra pas deux fois !
Dernier touriste ayant bu de la Root Beer…
Après un appréciable temps libre qui nous permet de visiter le petit musée de l’ancienne société d’exploitation du borax (utilisé dans la production de savon)
dont le produit fini raffiné était expédié depuis la vallée dans des wagons tirés par des groupes de 18 mules et 2 chevaux...
...qui ont donné la marque (renommée aux États-Unis) de 20-Mule Team,
avant
après...
Nous repartons péniblement (parce que le moteur du car chauffe et qu’on est obligés de s’arrêter pour éviter l’explosion… il semblerait en effet que notre chauffeur, le très avenant et loquace Lloyd, ne maîtrise pas bien la conduite technique de son véhicule…) en prenant du retard et avec des arrêts aléatoires qui ne nous offrent pas forcément les plus beaux points de vue…
Nous pouvons cependant apercevoir de loin les Mesquite Sand Dunes au nord de la vallée, souvent utilisées par le cinéma dans de nombreux films (comme Star Wars) pour des scènes de…dunes !
Par contre, plus le temps de s'arrêter, le moteur a enfin refroidi et on a une longue route à faire.. (j'entends Philippe s'énerver progressivement, l'air de rien, contre Lloyd... il n'élève pas la voix mais ça barde !)
A l’instar des pionniers ayant bravé tous les dangers, nous parvenons finalement à sortir du Nevada pour entrer dans la Vallée du San Joaquin en Californie… J’ai un petit pincement au cœur à l’idée que nous avons quitté les états des déserts et des Parcs Nationaux, avec le sentiment que nous avons vu le plus beau…
Nous traversons la plus vaste vallée irriguée des Etats-Unis à demi endormis malgré le raffut que font les jeunes au fond du car (ils jouent aux cartes… ah, on a voulu qu’ils se regroupent : c’est réussi !)
Puis Philippe nous met de la musique country dont nous entonnons les refrains avec enthousiasme (Yeh Yeh Youpi Yeh, Youpi Youpi Yeh), enfin, surtout Norbert, Charline et moi …(les autres auraient bien voulu dormir peut-être ?)
Philippe nous réveille pour nous montrer les champs de plantations de fruits secs (amandes, pistaches, noix de cajou et de pécan),
de melons, de tomates, de vignes et d’éoliennes,
ainsi que les nombreux puits de pétrole plantés au beau milieu des cultures !
Il faut savoir qu’¼ de ce que mangent les américains provient de cette vallée mais nous constaterons vite que si les fruits sont ici de forme parfaite, propres, brillants, lustrés (voire même cirés), ils sont par contre totalement insipides… il semblerait que ce soit le look qui prime pour la nourriture alors que les américains n’y accordent aucune importance pour les êtres humains ! (car selon Philippe : « ici, on ne juge pas les gens sur ce qu’ils sont ou paraissent être, mais sur ce qu’ils font » Nous, en attendant, on dort... )
Nous arrivons très tard à Bakersfield, il fait très chaud, ça tombe bien, l’hôtel Days Inn a une piscine et un jaccuzi dont nous allons profiter jusqu’à tard dans la soirée pour nous relaxer après cette étape de 450 km…