Au "Sugar Palace", la séquence sérénité du jour...
Nous continuons notre balade en admirant au passage les belles ohlalas qui jalonnent les routes des Plantations (oui, parce qu'on dit "la route" mais en vrai, il y en a plusieurs, de chaque côté de la Mississippi river.) Nous allons tenter d'apercevoir d'autres manoirs célèbres sans être obligés de payer l'entrée, faute de temps et de frusquin (voir plus bas...)
Diaporama : les ohlalas sur la route des Plantations
Voici Evergreen (4677 LA-18, Edgar). Construite en 1777, elle est réputée pour être la plus intacte et authentique, avec 37 bâtiments historiques classés. C'est notamment la plantation où ont été tournées des scènes du film "Django Unchained" (la maison est celle de Big Daddy et son quartier des esclaves celui de Candyland).
La preuve !
Elle présente elle-aussi une magnifique allée de chênes, bien visible de la route également.
Cette plantation, fondée par un riche allemand, était à l'origine dédiée à la culture de l'indigo avant de s'orienter vers l'exploitation sucrière comme toutes les autres.
Plus à l'est, San Francisco Plantation (2646 LA-44, Garyville) est une maison de style créole bâtie sur une plantation de canne à sucre qui fut d'abord créée par Elysée, un ancien esclave libéré, puis achetée par Edmond, qui y perdit sa femme et 6 de ses 8 enfants de la tuberculose et construisit la maison dès 1863 pour ses 2 fils restants... oui parce que lui, il n'en a pas trop profité, il est mort en 1866 à la fin de la construction !
Le nom de la plantation viendrait de l'expression "sans frusquin" (= argent au 18e siècle) qu'Edmond aurait employée pour désigner sa situation financière, constamment bancale malgré les recettes de l'exploitation sucrière...
La maison est ouverte à la visite depuis 1954. Elle a inspiré Frances Parkinson Keyes pour son roman "Steamboat Gothic"... en effet, sous certains angles, elle ressemble à un bateau à vapeur.
Nous grimpons à nouveau sur la digue (qui a d'ailleurs sacrifié les luxuriants jardins de la façade-avant de la maison) pour l'admirer d'en haut, elle est vraiment très belle et très originale avec ce bleu turquoise assorti à la déco de chez nous !
(A noter que, pour les deux précédentes plantations, pas de photos possibles à l'intérieur...)
Bien essayé... mais jamais on ne va croire que ce sont les mesas ocres de l'Utah !
Ici, par contre, nous nous arrêtons pour la visite... des jardins !
A Houmas House Plantation and Gardens (40136 LA-942, Darrow), on peut en effet ne payer que la visite des extérieurs pour 16$ par personne au lieu de 25.
Et ils sont magnifiques ! Le manoir lui-même est très photogénique mais il est en plus mis en valeur par une végétation luxuriante sur 15 hectares de jardins.
L'apothéose quand on arrive au bord du petit étang peuplé de cygnes et de canards...
Comme toutes les maisons de maître des plantations, elle a subi plusieurs transformations au cours des siècles au gré des modes architecturales...
L'intérieur a l'air aussi très luxueux et bien kitch comme on aime, il faut dire que c'était au 19e siècle la plantation la plus prospère de Louisiane... mais il nous faudra revenir parce que rien que la balade dans les jardins va nous prendre plus d'une heure !
Voici donc un petit diaporama du manoir vu sous toutes les coutures dans son écrin végétal...
Diaporama : Houmas Plantation House
Des jardins déjà très fleuris en ce mois de mai
avec des fontaines bien cachées
des bassins décorés
d'adorables petits ponts à la japonaise
d'immenses branches de chênes qui touchent le sol
des endroits ombragés qui incitent à de petites pauses
des cascades rafraichissantes (il fait quand même 32°C aujourd'hui !)
et des petits trésors disséminés un peu partout, parfois difficiles à découvrir... comme ces sculptures de Chihuly qu'on a failli louper tellement elles sont bien intégrées dans la végétation !
Ici, il faut y regarder à 2 fois pour se rendre compte que le charmant petit chérubin s'apprête à... écraser une grenouille !
Ci-dessous un diaporama des trésors cachés où déesses et angelots côtoient girafes, alligators, Leprechaun, maisons de lutins, poissons de pierre et diverses œuvres d'art à moitié dissimulées par la végétation... un vrai jeu de pistes !
Diaporama : Houmas Plantation and Gardens
On y croise même des apiculteurs
un cimetière pour les chiens...
et... mais bien sûr !!!
Ah ben oui, pas de discrimination, tout le monde a le droit de visiter à partir du moment où l'entrée est payée...
Retour à Lafayette par le -maintenant fameux... enfin sur ce blog du moins- pont meccano de Baton Rouge...
... qui parait presque jolie sous le soleil !
Nous terminons cette belle journée en profitant de la piscine de l'hôtel, que nous avons donc privatisée...
Avec la Vermillion river en arrière-plan... on n'est pas trop mal !
BONUS FAMILIAL
Diaporama : Nous à San Francisco et Houmas Plantations
A force d'être les seuls à visiter, on finit par se croire chez nous !
Départ pour Natchez, État du Mississipi... nous prenons le chemin des écoliers pour découvrir à St Francisville de nouvelles plantations parmi les plus belles de la Louisiane. Oui, je sais, ce voyage, ça devait être la route du Blues mais pour l'instant, c'est plutôt la route des Ohlalas ! La faute au changement de programme qui nous oblige à visiter les plantations sur deux jours consécutifs... cela dit, nous nous sommes bien débrouillés dans nos choix car entre Laura, Houmas House et aujourd'hui Rosedown et Greenwood, nous aurons visité des lieux très différents et tous très intéressants.
Donc c'est reparti sur l'autoroute qui surplombe les bayous...
...où on est effarés de voir les convois exceptionnels nous dépasser à fond la caisse sur la voie de gauche ! En fait, les routiers sont les rois aux USA, ils ont tous les droits... Conduire ne va d'ailleurs pas être de tout repos au cours de ce roadtrip, les habitants du sud n'étant pas vraiment très disciplinés sur la route... on aura souvent l'impression d'être les seuls à respecter les limitations de vitesse... Heureusement on a une voiture qui, en mode régulateur de vitesse, a un détecteur de mouvement sur les côtés... mais en contre-partie impossible pour moi de sommeiller un peu pendant les trajets, ça bipe non-stop ! (vu qu'on se fait aussi dépasser par la droite, ce qui est autorisé aux USA...)
Même lorsqu'on quitte la zone du Delta du Mississippi et qu'on redescend sur terre, l'eau n'est jamais bien loin (et la rivière non plus, mais toujours cachée derrière les digues...)
ça fait de jolis paysages
Cette route nous étonne par le voisinage des ohlala et des ouilleouilleouille qui se succèdent (NB : expressions toute personnelles et surtout très Martiniennes pour "belle maison" et "mobil-home")
Donc ouilleouilleouille
mignonne ohlala
re-ouilleouilleouille
Très mignonne ohlala
Vous remarquerez que les ouilleouilleouille de Louisiane sont quand même agrémentées d'une véranda avec colonnes...
Très très mignonne ohlala !
Il s'agit en fait de la Plantation Glynwood qui fait partie des sites historiques classés.
Puis nous passons sur le très beau pont Audubon... assorti à la valise de Martine ! (pour ceux qui n'auraient pas lu mes autres reportages, la valise orange dite "Bouygues" de Martine est devenue célèbre sur ce blog...)
Dans le secteur de St Francisville, les plantations sont le témoignage de l'âge d'or de la culture du coton en Louisiane. Nous n'allons pas nous arrêter pour visiter la ville, ce qui est bien dommage car j'ai pu voir après coup que son centre historique n'était pas dénué d'intérêt, même si cet ancien "plus grand port sur le Mississippi" est aujourd'hui une petite bourgade peu endormie... il nous faudra revenir !
Pour se rendre à Rosedown Plantation (12501 Hwy 10,St Francisville), on doit emprunter en voiture une longue allée magnifiquement bordée de chênes
pour la plupart envahis de chevelure végétale... j'adoooore !
Rien que l'arrivée est donc déjà spectaculaire dans cette plantation...
La maison, faite de bois de cyprès et de cèdres locaux, n'est pas mal non plus...
mais j'avoue que ce que je préfère, c'est l'écrin de mousse espagnole...
La plantation a été bâtie par la famille Turnbull en 1834, son nom vient du titre d'une pièce de théâtre que les propriétaires ont vue pendant leur voyage de noces en Europe. La construction du manoir a duré moins de 6 mois et n'a coûté que 13 000 dollars ! Le coton a été cultivé ici jusqu'à 1909 quand un insecte a détruit toute la récolte mettant fin à l'exploitation... En 1955, bien abîmée par le temps et le passage des troupes de l'Union, elle a été vendue à la famille Underwood qui a restauré la maison et les jardins pour un montant de 10 millions de dollars (!), l'a ouverte au public en 1964 puis l'a revendue à l’État de Louisiane en 2000. C'est donc un State Historic Site, du coup l'entrée (12$) est moitié prix par rapport aux plantations visitées hier...
Une plantation de Louisiane n'en serait pas vraiment une sans son allée de chênes bicentenaires...
Celle-ci est toute aussi belle que Oak Alley, j'ai l'impression que les chênes y sont encore plus chevelus, c'est superbe !
44 "live oaks", ça fait vraiment une longue allée...
une TRES longue allée !
Lorsqu'on regarde sur les côtés, on découvre des petites surprises, comme ce pavillon d'été et ses 2 fontaines...
En fait Rosedown est réputée pour la beauté de ses jardins à l'italienne... mais moi, je ne vois que les arbres !
Ce coup de foudre végétal est bien visible sur mes photos...
D'ailleurs, un peu plus et on ne voyait même pas sur ce cliché la 'Chambre des dames", petite dépendance habitée par les filles de la famille...
Et puis franchement, les parterres délimités par les haies basses sont un peu déplumés... ce n'est peut-être pas la bonne période : trop tard pour les azalées et les camélias, trop tôt pour les roses...
Donc, pour changer un peu, l'allée de chênes vue de la maison !
Nous aller visitons l'intérieur avec un groupe d'élèves d'une middle school de Bâton-Rouge (nous ne comptons qu'un seul élève de couleur...) On nous souhaite la bienvenue "dans la chaleur de la Louisiane" ! C'est vrai qu'on a un peu de mal avec les 32°C ressentis 35 !
Voici Scarlett O'Hara, qui briffe tous les gamins d'une voix sévère en leur expliquant que nous venons de très loin et qu'il faut nous montrer du respect en gardant silence et retenue pendant la visite... oups, même moi je suis impressionnée ! Cette fois encore, on nous donne un dépliant en français et la guide va parler très lentement, juste pour nous... c'est vraiment agréable de tout comprendre !
Dans le hall d'entrée, on ne peut pas louper le sol en toile cirée peinte à la main (en anglais, Scarlett a dit "oiled several times" mais c'est écrit comme ça dans le dépliant en français !)
Comme la plupart du mobilier de la maison, l'escalier en acajou est d'origine. Quant au papier peint, il est originaire de France : ce sont des petits carrés de lin assemblés, une prouesse décorative très bien rénovée.
L'association des couleurs est toutefois un peu audacieuse...
Dans la salle-à-manger, on peut voir un chasse-mouche au-dessus de la table : il était actionné par un esclave pendant le repas pour garder la salle fraîche et chasser les insectes.
Visiblement, les "pupils" ont été impressionnés comme moi par Scarlett parce qu'ils se montrent très attentifs et ne bougent pas une oreille !
Dans le petit salon...
...on trouve un pare-feu décoré d'un canevas brodé par Martha Washington, la première Première Dame des États-Unis.
Les chambres sont très belles, avec les meubles d'origine. Ici, le dépliant nous dit que le plancher est couvert en essuie-herbe pour le protéger mais là, je cale un peu niveau compréhension ! (la seule chose que je sais c'est qu'aux USA, le switchgrass est une fibre végétale...)
La Grande chambre était celle des parents, le berceau a été utilisé par tous les enfants de la famille.
Tous les lits ont un ciel-de-lit auquel on rajoutait une moustiquaire
La nursery, avec des objets personnels de la famille.
Je vous fais grâce du cellier, du fumoir, du bureau... mais je vous propose ci-dessous un petit diaporama avec quelques exemples de la richesse décorative de cette maison, tant au niveau des tissus que du mobilier..
Diaporama : Rosedown Plantation
Et comble du luxe, une douche attenante à la chambre du bas, très rare pour l'époque !
Je sens que ça vous manquait déjà... donc voici l'allée de chênes vue du premier étage ! En plus, elle est de façon notoire hantée par deux fils de la famille Turnbull, morts prématurément... donc peut-être qu'en regardant bien...
Aucun propriétaire n'ayant écrit ses mémoires, la visite nous régale moins d'anecdotes qu'à Laura Plantation, mais elle reste historiquement intéressante et on peut y voir de jolis portraits de ses habitants, comme celui de Sarah Turnbull
ou des photos de famille : ici quatre générations.
Par contre, la visite guidée fait peu de place à la question de l'esclavage, la guide nous montre juste sans s’appesantir l'escalier étroit et dérobé qu'ils utilisaient dans la maison et, à l'extérieur, on trouve ce document affiché sur le mur d'un bâtiment annexe (à côté, un papier nous explique que "griffe" correspond à un métissage mulâtre+amérindien, "sambo" c'est mulâtre+ noir, "yellow" c'est "presque blanc " et "noir" ça signifie Africain !) Pas de vestige du quartier des esclaves où résidaient quand même 250 personnes, comme le mentionne le dépliant qui nous a été donné à l'accueil.
A l'arrière de la maison, on peut voir la cuisine, toujours située à l'extérieur des maisons de maître (si vous avez bien suivi mes précédents articles, vous savez que chaleur+incendies sont les pires ennemis des habitants du sud... avec les moustiques, les tempêtes et les inondations !)
C'est un des rares bâtiments extérieurs dans lequel on peut entrer...
Encore un pavillon, qui a servi notamment de résidence aux premiers propriétaires car leur fille avait envahi la maison principale avec ses 10 enfants !
Un petit tour dans les jardins qui, malgré leur valeur historique et leur authenticité, ne nous émerveillent pas autant que ceux de Houmas House...
...par contre, ça oui ! Si vous avez le courage d'arriver jusqu'au bonus familial, vous pourrez voir à quel point j'ai craqué pour cette photogénique mousse espagnole... même pas peur du ridicule !
Le côté de la maison principale : les esclaves n'avaient le droit d'entrer que par l'escalier de la façade arrière...
Après un repas dans l'aire de pique-nique située à l'entrée de la Plantation, où nous oublions notre mini toile cirée comme souvent au cours de nos roadtrips mais on persiste à en emporter une...),
nous quittons Rosedown avec un arrêt/photo au niveau du portail de Myrtles Plantation (7747 US-61, St Francisville), qui est la plus hantée de toutes les plantations hantées du monde, l'esclave Chloé ayant empoisonné sa maîtresse avec un gâteau contenant de l'arsenic (pouah, faut aimer !)
Nous nous rendons maintenant à Greenwood Plantation (6838 Highland rd, St Francisville), accessible par une voie plus ou moins bien entretenue...
Nous ne payons que la visite des jardins (7$), il n'y a pas ici de parterres de fleurs luxuriants ou de potager, mais une forêt de chênes de Virginie digne d'un conte de fée !
On s'attend à tout moment à voir sortir un elfe ou une sorcière de derrière les arbres, l'ambiance est magique, et en plus...
...on est tout seuls !
La preuve !
(si on excepte les petites mouches chatouilleuses qui nous attaquent sous les chênes...)
La maison, de style néoclassique imposant, est un carré de 30m de côté et elle est entourée de 28 colonnes de 12m de haut, en brique recouvertes de stuc. Son architecture est vraiment originale : contrairement aux maisons de cette époque, elle n'a pas de balcon au premier étage et son toit plat est surmonté d'un belvédère.
Si les soldats nordistes ont fait sauter beaucoup de bâtiments de la plantation pendant la guerre, la maison principale a été épargnée car elle a servi d'hôpital.
Sauf qu'en 1960, frappée par la foudre, elle est totalement détruite par un incendie ! (excepté les cheminées et les 28 colonnes en brique...) En 1968, les ruines et le terrain sont rachetés pour 30 000$ puis tout est reconstruit à l'identique. De nos jours, seul le rez-de-chaussée est ouvert à la visite, les propriétaires actuels habitant le premier étage.
Comme son parc possède un bassin (créé par l'extraction à cet endroit de l'argile destinée à fabriquer la brique des colonnes), ça rajoute de la photogénie au décor...
Greenwood est notamment le lieu de tournage du film Bagatelle et de la série Nord et Sud qui date déjà de 1985, ce qui ne nous rajeunit pas !
Les anciens propriétaires (ceux qui ont tout reconstruit après l'incendie) sont inhumés dans le parc.
La plantation est aussi un Bed and Breakfast où on nous propose de dormir et quand je me plains des "crazy flies", on me répond que les meilleures périodes pour visiter la Louisiane sont mars et octobre... il faudra revenir !
Nous reprenons la route pour entrer dans l'état du Mississippi, "lieu de naissance de la musique américaine".
On a privatisé la belle US-61, du coup je prends le volant jusqu'à Natchez... une grande première ! (Oui parce qu'en principe, je laisse Norbert ou Martine s'y coller... moi je gère le GPS et les photos !)
Autant vous dire qu'on apprécie la vue de notre hôtel !
Arrivés à Natchez, nous prenons possession de notre chambre et profitons un peu de la piscine avant de repartir en voiture... voir des maisons Antebellum ! Il faut dire que Natchez, au 19e siècle, était une des villes américaines comptant le plus de milliardaires, grâce au commerce du coton et des esclaves... toutes ses rues sont donc des Ohlalas trails !
Par contre, j'oublie mon appareil-photo à l'hôtel, du coup il faudra se contenter des photos prises avec le téléphone...
L'Hôtel Vue porte bien son nom...
En effet, pour voir la Mississippi River et le pont Meccano local, il suffit de sortir sur la pelouse devant notre chambre...
Et c'est parti pour l'orgie des Ohlalas, manoirs de plantations construits au 19 siècle, pour la plupart dans le style néo-classique : grandes colonnes blanches, balcons ouvragés, frontons avec lucarnes ovales... En cette fin de journée, nous privilégions les demeures éloignées du centre-ville en suivant un circuit en voiture sur les hauteurs de Natchez, avec des arrêts-photos.
Auburn (400 Duncan ave) est un imposant manoir de brique rouge construit en 1812, avec des colonnes corinthiennes surmontées d'un fronton triangulaire. Après 17h, tous les musées sont fermés aux USA, nous ne pouvons donc pas visiter l'intérieur qui est meublé avec du mobilier français et présente, parait-il, un très bel escalier en spirale.
Dunleith (84 Homochitto St), bâtie en 1855, est entourée de 26 colonnes. Au premier étage, une galerie fait le tour de la maison. Seul le rez-de-chaussée se visite, les étages et les dépendances servant de B&B de luxe. Plusieurs films y ont été tournés comme "Les aventures de Huckleberry Finn" ou "Nord et Sud".
Monmouth (1358 John A Quitman Blvd)date de 1818. Le manoir fut la maison du général John A. Quitman, un des 1ers gouverneurs du Mississippi et héros de la guerre du Mexique.
Transformé lui aussi en hôtel de luxe, voici un exemple de chambre...
Linden (1 Corner Circle) est un... Bed and Breakfast ! Construite en 1800 sur un domaine de plus de 10 hectares, la maison fut le domicile du premier sénateur des États-Unis, qui la fit agrandir. Elle est entourée d'un vaste balcon qui surplombe une galerie où fut tournée une scène de "Autant en emporte le vent".
D'Evereux (160 D'Evereux Drive), comme la plupart des autres manoirs, a été bâti en haut d'une colline, histoire d'être bien visible... C'est toujours aujourd'hui une maison privée, non visitable.
The Elms(801 Washington St), nichée dans un beau cadre de verdure, est une des plus anciennes demeures de Natchez. Elle est restée dans la même famille pendant plus de 130 ans. C'est aussi un Bed and Breakfast.
Ah oui, ça fait envie... bon on va dire que la vue n'est pas aussi belle que celle de notre hôtel !
Nous parcourons le quartier au hasard pour admirer d'autres belles maisons dont je ne trouve des infos nulle part, comme Byrnes /Pansano House...
ou celle-ci qui n'a même pas de nom... et qui est à vendre ! (comme beaucoup d'autres d'ailleurs...)
Diaporama : Belles maisons résidentielles des hauteurs de Natchez
On finit la journée avec un coucher de soleil plus-beau-que-ça-tu-meurs
Natchez est une des plus anciennes colonies d'Amérique du Nord. Des débuts de la navigation à vapeur sur le fleuve Mississippi (dans les années 1810) jusqu'à la Guerre de Sécession (1861-1865), Natchez prospéra grâce au commerce du coton, au point de devenir une des villes les plus riches des USA.La ville possède ainsi le plus grand ensemble de maisons antérieures à la guerre de Sécession, à savoir environ 500 églises et manoirs !
En cette journée pluvieuse, nous poursuivons donc le Ohlala Trail... Aucune visite intérieure* toutefois, je sens que Norbert est en train de saturer... après l'overdose d'arbres en 2017, c'est le burn out des "mansions" qui le guette ! La grisaille ambiante et les rues désertes du downtown ne vont pas nous aider non plus à apprécier cette ville à sa juste valeur... il faudra revenir !
* pour info : 20$ l'entrée par maison antebellum mais il est possible d'en visiter 3 pour un forfait de 45$ (tarifs 2019)
Aujourd'hui, c'est à pied que nous allons faire le tour des maisons historiques classées : en effet, les propriétés des planteurs sont ici très proches les unes des autres et non séparées par plusieurs kilomètres comme en Louisiane, les riches colons préférant la vie mondaine de la ville à l'isolement des plantations de coton... Un grand nombre de manoirs est d'ailleurs rassemblé dans le centre-ville, proche du Mississippi, au sein d'un rectangle délimité au nord par Madison Street, au sud par Orleans Street, à l'ouest par Broadway et à l'est par Pine Street.
Nous commençons donc par un copieux petit-déjeuner pour nous donner des forces, on apprécie la vue et le gospel que chante (joliment) notre serveuse à la demande d'un couple de touristes...
Après une brève étape au Visitor Center, nous voilà devant notre premier domaine, Rosalie Mansion § Gardens(100 Orleans St).
Cet imposant manoir en briques fut construit en 1823 par un négociant de coton, à proximité du lieu d'implantation du premier fort français en 1716, sur la colline surplombant la Mississippi river. L'armée de l'Union en a fait ses quartiers généraux pendant toute la durée de la guerre de Sécession, plantant ses tentes dans les jardins... La visite permet de découvrir le mobilier importé d'Europe mais aucune photo n'est autorisée à l'intérieur.
La demeure est belle sous toutes ses façades... Ici l'arrière.
Là, le côté.
En plus, elle propose une superbe vue sur le pont Meccano (oui, bon, en vrai il s'agit du Natchez-Vidalia Bridge) et sur Nachez-Under-The-Hill, vestige de l'ancien port commercial qui, construit au bord du Mississippi, fut détruit par le déplacement du lit du fleuve... Silver street est la seule rue qui subsiste aujourd'hui et, comme on se la joue fainéants, on ne prendra pas la peine d'y descendre car rien que la perspective de devoir remonter nous décourage !
Quelques pas nous emmènent ensuite dans le centre-ville... où on ne croise personne !
Bon, ok, il tombe quelques gouttes par moment... mais on ne s'attendait quand même pas à une ville fantôme !
Council Chamber et First Presbyterian Church
The Guest House (401 Franklin St), comme son nom l'indique, est une maison d'hôtes... De toutes façons, les maisons historiques de Natchez sont soit des musées, soit des B§B, soit en vente... parfois les 3 en même temps !
Si ça vous tente...
Magnolia Hall(215 South Pearl St), bâti en 1858, est le plus récent des grands manoirs de Natchez. Comme la plupart des autres demeures historiques de la ville, c'est un bel exemple d'architecture d'inspiration grecque mais son "total look brique" le distingue des autres...
A l'étage, on peut notamment admirer une exposition de robes antebellum
NB : je me permets dans cet article de rajouter en bonus quelques photos de l'intérieur des maisons piochées sur le web, soit sur les sites des agences immobilières, soit sur des blogs privés dont vous trouverez le nom en bas des photos.
Prentiss Club(211 N Pearl St), dont le toit a été rénové après avoir brûlé en septembre 2018... A noter que l'architecture des maisons de Natchez, qui a privilégié la brique plutôt que le bois, a permis de préserver toutes ces belles demeures des incendies, de la guerre et du passage du temps...
Ci-dessous un diaporama de la déco intérieure toute en simplicité et modestie...
Diaporama : Prentiss Club
Pour ceux qui ont de l'argent à placer, William Harris House (311 Jefferson St), est en vente au prix de 475 000$, avec 5 chambres...
Aussi beau dedans que dehors avec son plancher acajou et ses tapisseries anciennes...
En fait, de nombreuses maisons historiques sont en vente, on voit des panneaux d'agences immobilières partout : 211 698$ celle-ci, mais 4 chambres... seulement !
Myrtle Terrace (1844) avec une belle grille ouvragée.
Magnifique et imposante Stanton Hall (401 High Street), maison d'un riche planteur de coton considérée comme la plus belle maison de Natchez. Frederick Stanton, qui l'avait conçue en 1857 comme une réplique de sa maison ancestrale en Irlande, l’appela «Belfast» mais il n’y vécut que peu de temps, environ neuf mois, avant de mourir de la fièvre jaune (c’est ballot !)
On peut visiter ce superbe exemple d'architecture néo-grecque mâtinée d'influences victoriennes, fait de brique recouverte de plâtre. Il a été préservé pendant la guerre civile par les troupes nordistes qui l'ont occupé lui aussi.
Un exemple de chambre...
Nous montons jusqu'au 801 Myrtle avenue pour voir le très beau (et un peu excentré) Bed and Breakfast "The Towers" (qui a donc des ours dans ses jardins... voir la photo du jour !), construit en 3 étapes entre 1798 et 1858, année où fut rajoutée la façade italianisante. Étant donné sa situation stratégique en hauteur, la propriété fut à l'instar de Rosalie Mansion et Stanton Hall réquisitionnée par les soldats de l'Union (on a retrouvé des balles nordistes dans les jardins !)
Pour rejoindre ce manoir, nous traversons un quartier très différent... plein de mobil-homes plantés à proximité des majestueuses maisons antebellum... c'est étonnant !
Nous ne voyons pas âme qui vive jusqu'à ce qu'une grosse voiture s'arrête à notre hauteur et qu'un monsieur blanc et bien nourri nous apostrophe pour nous conseiller de ne pas nous attarder ici parce que " ce n'est pas un bon quartier" !
Toutefois vous constaterez ici aussi que même les mobil-homes ont des vérandas avec colonnes...
Choctaw Hall(310 North Wall St), construit vers 1836 par un architecte écossais, est un manoir très élégant qui présente un mélange de style néo-grec et fédéral avec des porches doubles et des colonnes blanches sur les façades avant et arrière.
Son nom provient d'une tribu amérindienne qui a aidé les colons français en 1973 dans leur guerre contre la tribu des Natchez...
La maison a servi tour à tour de résidence pour riches hommes d'affaires, d'école pour jeunes-filles de bonne famille, de bureaux pour l'auditorium voisin, de galerie d'art... avant d'être la proie d'un incendie en 1978. Le propriétaire actuel, qui l'a rénovée, a créé 4 chambres d'hôtes et il fait visiter personnellement les 3 autres étages trois fois par jour.
Ce manoir est tellement beau à l'intérieur que cela mérite bien un diaporama ! (Là, pour le coup, je regrette vraiment la visite... il faudra revenir !) On peut y voir notamment 4 collections complètes de vaisselle en porcelaine de France utilisées sur 7 générations (il n’était pas inhabituel pour les familles d’organiser 17 plats qui duraient des heures...) On y trouve même une immense chambre divisée en deux parties, avec d'un côté le grand lit pour madame et en face celui de monsieur, tout aussi grand ! (Photo ci-dessus trouvée sur le site officiel)
Diaporama : Choctaw Hall
Juste à côté, le Natchez City Auditorium avec son portique d'inspiration dorique (pas tout a fait la même architecture que celui de Lyon !)
Basilique catholique St Mary (1842) de style néogothique, seule cathédrale du Mississippi
Moi j'adore les décos intérieures bleues... dans les maisons comme dans les églises !
On rejoint le Bluff Park pour regarder passer, sur le Mississippi, plusieurs très longues barges, preuves que le fleuve est toujours aujourd'hui une voie commerciale. A noter que de l'autre côté... c'est la Louisiane !
ça, c'est Norbert qui attend patiemment pendant que je tire mes 500 000 photos... En voici un extrait ci-dessous avec d'autres belles maisons dont vous pourrez voir que beaucoup sont en vente...
Diaporama : maisons de Natchez
Une brusque ondée nous précipite en urgence dans le Visitor Center où nous en profitons pour goûter le gâteau entrevu ce matin, depuis le temps que je voulais tester ces "magnifiques" gâteaux américains... en fait, de la génoise et du sucre... pas terrible ! Mais cette petite attention envers les touristes est sympa...
On en profite pour discuter avec une petite dame de 79 ans, française expatriée et fan inconditionnelle de Paul Anka, qui fait une courte étape dans sa descente en voiture vers la Nouvelle-Orléans au grand dam de ses enfants qui insistent à chaque fois pour qu'elle prenne l'avion... mais non, même pas peur !
Bon, on s'intéresse aussi aux expositions qui retracent l'histoire des premiers habitants de la région, les indiens Natchez adorateurs du soleil dont on trouve des traces depuis 700 après JC. Lorsque les colons français se sont installés en 1716, les Natchez d'abord accueillants ont fini par se rebeller contre une énième tentative d'appropriation de leurs terres et ont attaqué le fort Rosalie, tuant en un seul jour 250 Français. Pour venger la mort des colons et la destruction du fort, l'armée française écrasa la tribu Natchez en 1730, avec l'aide des Indiens Choctaw. Cet acte ne leur a pas porté chance puisqu'ils se sont fait ensuite déloger par les anglais, eux-mêmes chassés par les espagnols qui ont fini par céder la ville au tout nouveau territoire américain du Mississippi...
Natchez propose un site historique à la périphérie de la ville, "le Grand village des indiens Natchez" (400 Jefferson Davis Boulevard) mais nous sommes passés à côté en voiture hier soir et il n'y a pas grand chose à voir à part quelques tertres, dont le tumulus sur lequel était construite la demeure du Grand Chef.
Pour l'anedocte, à la mort du Grand Soleil (ainsi qu'on l'appelait, Louis XIV n'ayant rien inventé...), ses épouses et serviteurs étaient étranglés, la demeure brûlée, et le tertre surélevé afin de construire, sur l'emplacement de l'ancienne demeure, celle de son successeur...
Aujourd'hui, nous devons faire des courses pour nos pique-niques et sur la route qui nous mène au supermarché, nous en profitons pour nous arrêter à Melrose (1842) qui fait partie aujourd'hui du National Park Service. Nous trouvons la maison fort belle, d'autant plus qu'elle est entourée de mousse espagnole... ça me manquait dans nos visites du jour !
La visite est ici moins chère (10$) mais là, c'est déjà fermé ! (ah ben oui, 16h : trop tard !)
On peut quand même y voir des expositions dans les bâtiments adjacents car le parc est ouvert jusqu'à 17h : ici, tous les différents conforts des bolides de l'époque !
Pour finir, les USA préparant la Fête des Mères, c'est débauche de pâtisseries de toutes les couleurs dans les supermarchés... heureusement, ça ne nous tente pas : maintenant, on sait que ce n'est pas bon !
Diaporama : La Fête des mères au rayon pâtisserie...
Voilà, je pense que nous en avons fini avec les belles Ohlalas du Sud... demain départ pour Indianola sur la route de la musique !
→ Pour revoir toutes mes photos des maisons antebellum sur les routes des plantations, cliquer ici :
De la Nouvelle Orléans à Memphis : "l'Historic Blues Highway"
Un Historic Marker à Natchez
Sillonnant les États du Sud, l'Highway 61, à l'instar de la route 66, fait partie des routes historiques des USA. Dans le Delta du Mississipi (zone en forme de triangle située dans l’État éponyme), le Mississipi Blues Trail est jalonné de plus de 140 "Markers", panneaux didactiques en lien avec l'histoire de la musique et qui honorent tous les artistes originaires du Delta, des plus célèbres comme Charley Patton, Robert Johnson, Muddy Waters, B.B. King ou même Elvis... à d'autres moins connus du grand public.
J'aborde cette partie du road-trip avec des yeux et des oreilles de néophyte : élevée à coup de Beatles, Pink Floyd, Bowie, Mozart et Beethoven, amatrice de pop et de musique classique, adolescente dans les années 70... le Blues, la Soul et le Jazz ne font pas vraiment partie de mon histoire personnelle. Bien sûr, je connais quelques grands noms comme B.B. King, Ella Fitzgerald, Aretha Franklin, Otis Redding, les Blues Brothers ou Plastic Bertrand... (c'est pour voir si vous suivez !), mais je serais bien incapable d'entonner une de leur chanson ! (par contre, je peux vous chanter "Le Duo des fleurs" de l'opéra Lakmé ou "Gali l'Alligator"... mais vous n'aimeriez pas !)
Le blues est né vers la fin du 19e siècle, il évoquait initialement les dures conditions de vie des afro-américains employés dans les plantations de canne à sucre, de coton ou de riz. Bien que l'esclavagisme ait été aboli en 1865 aux USA, les afro-américains subissaient encore une forte discrimination d’où la naissance de ce style initialement chanté a capella dans ce que l’on appelle aujourd’hui des work-songs dont voici 2 exemples ci dessous :
Un extrait de la série "Racines"
Un extrait du film O'Brothers
Ces chants de travail sont le versant profane des chants Gospel, spirituals nés de la rencontre entre la culture musicale africaine des esclaves et les chants religieux de leurs propriétaires. Le rythme du chant s'associait aux gestes répétitif du labeur, ce qui entrainera le mouvement rythmique du balancement que l'on nommera plus tard le "swing" ou le "groove"... Il faudra attendre le milieu des années 1950 pour parler de "rythm'n'blues", forme plus évoluée où se sont joints au chant divers instruments : orgue, guitares, cuivres, batterie...
Pour vous parler de musique, le spécialiste dans notre couple, c'est Norbert(ici, devant la fresque de B.B. King ), lui-même musicien... mais voilà, ce n'est pas lui qui rédige le blog donc il faudra vous contenter de mon regard moins connaisseur !
Au gré des musées visités, j'ai quand même appris 2 ou 3 choses :
- Le mot "blues" vient de l'expression "to get the blue devils" qu'on peut traduire par "avoir le cafard".
- Le blues est un rythme ternaire : en anglais, ternaire peut se dire "shuffle", ce qui signifie "traîner des pieds". Une image qui colle tout à fait à ce style musical !
- Le blues se distingue aussi par une forte utilisation des accords 7, ce qui l'a amené à développer sa propre harmonie (un accord 7 est un accord majeur sur lequel on rajoute une note : la 7e mineure). A cette époque, rester sur des accords de 7 était plutôt mal vu : c’est un accord plutôt dissonant mais les premiers bluesmen ont transgressé cette règle, apportant un changement radical.
L'intro de "Lucille" de B.B. King
De nos jours, les accords 7 sont fréquemment usités ; la musique pop-rock contemporaine doit tout au blues et à ses cousins ou dérivés : jazz à la Nouvelle-Orléans, soul et rock'n'roll à Memphis et même la country à Nashville qui n'est en fait qu'un mélange de folklore britannique et d'accents de rythm'n'blues né dans les work-songs des cow-boys blancs...
Aussi, à tout ceux pour qui un tel voyage ne serait pas un pèlerinage sur la terre de leurs idoles, je précise ceci : visiter tous ces musées consacrés à la musique-phare des débuts du 20e siècle n'apporte pas que le plaisir du mélomane... c'est également une passionnante façon d'appréhender l'histoire des afro-américains et de leur émancipation par la musique... car la reconnaissance du talent de la population noire a participé grandement au combat contre l'obscurantisme et le racisme, et c'est ce long chemin difficile (et pas encore terminé...) que racontent musées et Historics Markers consacrés à la musique sur la route du Blues... à tel point que lorsque nous visiterons le Musée des Droits Civiques à Atlanta, nous aurons l'impression de déjà tout savoir !
Pour lire cet article en écoutant B.B. King, cliquer ci-dessous
La photo du Jour
A Indianola, pour se rappeler où ils habitent, les gens sont obligés de le graver sur les murs !
Pour notre premier jour sur la Route du Blues dans l’État du Mississippi, nous avons choisi... de ne pas l'emprunter ! Un petit détour sur la Natchez Trace Parkway (jalonnée de sites archéologiques, marais et villes fantômes) pour découvrir Jackson, capitale du Mississippi, flâner sur le marché artisanal de Canton et admirer les maisons colorées de Yazoo City avant de rejoindre notre prochaine étape, Indianola. Mais c'est sans compter sur les aléas des voyages... Nous nous apprêtons en effet à quitter l'hôtel de bonne heure quand un bruit étrange se manifeste dans mon sac... c'est mon téléphone qui nous gratifie d'une sonnerie de message inédite et lorsque je le consulte...
Oups ! ça nous rabat illico dans notre chambre avec armes et bagages ! (enfin, surtout bagages...)
Obéissants, on se branche sur la chaine météo qui nous montre que la dangereuse-tempête-avec-risque-de-tornade... suit exactement le trajet que nous comptions emprunter, en se déplaçant vers l'est !
Ah ben oui, ça ne donne pas vraiment envie de sortir...
Nous ne souhaitons pas nous retrouver au beau milieu d'une tornade avant la fin de notre roadtrip, aussi, en considérant les 3 trajets possibles pour monter à Indianola, il nous apparait plus raisonnable d'emprunter la route la plus à l'ouest, ce qui nous oblige à modifier encore notre programme...
Disciplinés jusqu'au bout, nous attendons 10h avant de prendre la route... partir par la gauche de Natchez nous fait donc emprunter le pont Meccano où nous nous sentons un peu seuls !
Après le passage des "severe storms", l'eau est partout... mais nous n'aurons plus la pluie pendant tout notre trajet.
Lake Providence
Emprunter cette route moins touristique va nous permettre d'appréhender l'arrière-pays de l’État du Mississippi, et ce sera une succession de villages peu reluisants...
voire même fantômes...
Alors comment dire... oui mais non !
Avec des ouille-ouille-ouille inondées
très inondées !
Mais bon, ce n'est pas grave car, visiblement, ils peuvent déménager facilement !
Les vitrines des commerces ne laissent pas de doute sur la population qui habite ces villages sinistrés...
Il y a bien quelques maisons plus cossues de temps en temps...
...mais les plus jolies Ohlalas sont les funérariums !
On continue de longer la Mississippi river où les bayous ne sont jamais vraiment bien loin...
et parfois on la traverse (ah tiens, pour une fois, ce n'est pas un pont Meccano !)
Il est déjà midi, nous nous arrêtons pour pique-niquer à 40mn d'Indianola, au Greenwood Cypress Preserve Trust parce que nous sommes déjà en manque de bayous !
L'endroit propose en effet plusieurs courtes balades et nous avons l'intention de les faire toutes avant le repas pour nous consoler des visites annulées...
Mais à peine quelques pas et voilà l'état du sentier ! Bon, on a encore l'espoir de pouvoir emprunter une autre partie de la boucle...
Ah ben non... pas mieux !
On se contentera donc d'une petite promenade sur la route principale, le long du "swamp" bien inondé... c'est beau !
Les couleurs du marécage sont extraordinaires...
Par contre, les habitants de cette coquette maison doivent être moins extasiés que nous !
On entraperçoit avec frustration le pont en bois du trail...
Bye bye les bayous !
Nous reprenons la route en passant à côté de l'original Visitor Center de Greenville... nous avons l'intention d'aller visiter les Winterville Mounds, un site archéologique amérindien présentant une vingtaine de tumulus (dont un tertre haut de 17m) ainsi qu'un musée avec plein d'artefacts... ça promet d'être intéressant parce que jusqu'à maintenant, nous avons vu peu de vestiges des cultures précolombiennes aux USA...
Mais les orages, là aussi, ont fait des ravages et toutes les voies que nous essayons d'emprunter pour nous rendre sur le site sont fermées à la circulation ! Pfff.... c'est la journée de la loose ! Plus qu'une solution : oublier les visites et balades en extérieur et se rabattre dans un musée bien au sec...
ça tombe bien parce que nous arrivons à Indianola où il y en a justement un que nous n'aurions pas eu le temps de faire si nous avions pu respecter notre programme initial (et finalement, ça aurait été bien dommage) :
De son vrai nom Riley B. King, B.B. King (pour Blues Boy) est considéré comme l'un des précurseurs du blues et un guitariste de génie à la renommée mondiale... Beaucoup de guitaristes célèbres, comme Eric Clapton, Jimi Hendrix ou Bob Dylan, ont d'ailleurs déclaré avoir été influencés par son jeu et sa musique. Il a popularisé le blues, l'a fait rentrer dans tous les foyers américains avant de le faire voyager dans le monde entier. Musicien-chanteur-compositeur, performer acharné, il a multiplié les disques, les concerts (entre 200 et 300 par an !), les tournées jusqu'à ses 89 ans !
Pour résumer, il a été le King du blues comme Elvis était le King du rock, Kenny Rogers le King de la country, Michael Jackson le King de la pop et Plastic Bertrand le King du n'importe quoi (ah ben oui, il revient de temps en temps pour vérifier que vous suivez bien !)
Né en 1929 pas loin d'Indianola où il a vécu 3 ans de son adolescence, le roi du blues commence sa vie professionnelle dans les champs de coton où il conduit un tracteur, bercé par la musique gospel et les work-songs (voir l'article précédent). Il se produit d'abord le samedi soir au coin des rues ou dans les "juke-joints" de la ville (terme du Delta désignant un local au confort sommaire et à la façade peu engageante généralement sans fenêtre, à l'origine fréquenté uniquement par les afro-américains et qui proposait des concerts live ou diffusait de la musique sur un juke-box), fait une première tentative infructueuse à Memphis en 1947, revient travailler dans les champs, retente sa chance à Memphis et finit par devenir la légende du blues !
Le musée retrace donc sa vie au travers d'objets lui ayant appartenu ou similaires à ceux qu'il utilisait, comme ce vélo avec lequel il se rendait sur la plantation de coton,
bien sûr, les guitares du King...
ou d'autres musiciens de blues
des costumes de scènes
son carnet de chants annoté de sa main
sans oublier l'amour de sa vie, avec qui il passait toutes ses journées et une partie de ses nuits : la belle Lucille...
Pour vous expliquer qui est Lucille, rien de plus facile : il me suffit de vous traduire une partie de la chanson éponyme !Cette guitare à la découpe caractéristique est en fait une Gibson ES-355 fabriquée avec quelques variantes exclusivement pour B.B. King à partir de 1980 (c'est donc le modèle "B.B. King Lucille"). Celle pour laquelle il a risqué sa vie à 24 ans dans l'Arkansas lui avait coûté 30 dollars !
On trouve donc des Lucille partout dans le musée... pour nous, elle a une valeur particulière parce que... Norbert en possède une ! (pas une de B.B., je vous rassure...)
Documents et objets personnels, archives de presse et présentations multimédias... ce sont plus de 60 ans de carrière qui sont retracés ici.
Plein de Grammy Awards !
Dans la section "Artist to Icon, 1960's" les expositions mettent également en lumière la lutte de la vie sur le delta du Mississippi avant, pendant et après le mouvement des droits civiques dans le grand sud, ainsi que le rôle joué par les musiciens de blues dans la transformation du sentiment du public à l'égard des Afro-Américains .
Un super graveur !
C'est dans cette section que Norbert a reçu son premier choc du voyage : il a pris la mesure du temps écoulé en constatant que, dans les musées, sont présentés tels des vestiges... les studios d'enregistrement comme il les a connus pendant sa vie de musicien ! (et encore celui-ci, il est récent : on voit un ordinateur et pas de magnétophone à bandes !)
Heureusement, il se console (de mixage) avec son petit enregistrement perso...
Au gift shop, une Lucille pour Martine... couverte de capsules de bières !
Aux abords du musée et dans le downtown d'Indianola, des fresques, des panneaux et des sculptures égrènent pour les visiteurs les lieux qui ont marqué la vie du roi du blues.
Par exemple, au coin de l'église et de la 2ème rue, l'endroit où B.B. King a joué au début des années 40 et a laissé ses empreintes dans le trottoir.
ça et là, de jolies Lucille...
et le mythique Club Ebony, un des plus anciens jukes-joints connus, qui a offert à des futurs grands du blues comme B.B. King l'opportunité de jouer pour des foules diverses et de gagner en visibilité dans l'industrie du disque. D'ailleurs le King a tellement aimé le lieu qu'il l'a acheté en 2008 ! Il continue d'être un endroit apprécié des musiciens de blues (depuis 1945, il a accueilli des icônes musicales telles que Count Basie, Ray Charles, James Brown, Ike Turner, Little Milton, Willie Clayton...)et un lieu de pèlerinage pour les fans.
On continue notre balade dans Indianola.
En 1882, la ville s'appelait " Bayou Indien " car les berges de la rivière étaient auparavant occupées par un village choctaw. Elle changea ensuite de nom à plusieurs reprises avant que celui d'Indianola ne soit retenu en 1886, en l'honneur d'une princesse indienne nommée Ola.
Nous sommes gracieusement invités par des commerçants d'élégance très british dans une boutique d'artisanat très british également, à participer au "tea-time" organisé à l'intérieur, avec dégustation de produits locaux et exposition d'artistes du coin... le moment est très sympa, nous prenons le temps de discuter, et nous faisons bien rire Josh Vincent, l'artiste de ces "mugs moches", en lui disant que certains nous font penser au Prince Charles et d'autres à Camilla...
D'ailleurs, il joue le jeu de la photo pour nous !
En fait on adore ses mugs moches mais rapporter des objets en céramique quand on a déjà les valises pleines de colliers moches de carnaval... bon, maintenant, je regrette, évidemment !
Je pense en plus que notre remarque a dû lui donner des idées car voici ses dernières réalisations trouvées sur le net !
Nous finissons par rejoindre notre hôtel où, visiblement nous ne serons pas trop dérangés par les voisins...
Ci-dessous un diaporama des petites ohlalas sur le trajet...
Ce soir, pas la jolie vue que nous avions à Natchez mais toujours un beau coucher de soleil...
BONUS FAMILIAL
Diaporama : Nous à Indianola... enfin, en l'occurrence, juste lui !
De quoi s'agit-il ? Un indice : Plastic Bertrand ne l'a pas obtenu mais Milli Vanilli (duo germano-français), oui ! Et pourtant aussi menteurs l'un que l'autre puisque dans les deux cas... personne ne chantait !
Pas de tornade prévue aujourd'hui mais la pluie est toujours au rendez-vous... Cela va réduire nos balades en extérieur et nous précipiter dans les musées ! Cela tombe bien car, sur la route qui nous mène à Memphis, nous allons nous arrêter à Cleveland, sur les conseils de notre charmante commerçante d'hier, pour visiter le Grammy Museum du Mississippi.
Carte des intérêts touristiques du trajet du jour.
La journée commence forcément bien quand la salle du petit-déjeuner de l'hôtel met un gaufrier à notre disposition... mais du coup, qui dit breakfast inclus, dit départ plus tardif le matin !
Le Blues Trail continue de suivre le Mississippi dont la hauteur d'eau affleure déjà le niveau de la route...
Petit frère de celui de Los Angeles, le Grammy Museum de Cleveland célèbre depuis 2016 tous les métiers de l'industrie de la musique en braquant le projecteur sur les racines musicales du Mississippi.
Les Grammy Awards ou Grammies, créés en 1958, sontl'équivalent de nos Victoires de la Musique. Les trophées sont décernés chaque année par la "National Academy of Recording Arts and Sciences" afin d'honorer les meilleurs artistes et les meilleurs techniciens dans le domaine de la musique. De nombreux artistes du Mississippi ont été récompensés, comme B.B. King qui a reçu 16 récompenses, Muddy Waters (7), Charley Patton (considéré comme le Père du Blues, il avait du sang Choctaw...) ou Elvis (14 nominations mais seulement 3 prix !)
Le trophée est une élégante statuette représentant un gramophone (vous avez pu voir les Grammies de B.B. King dans l'article d'hier...), sa représentation géante trône bien sûr à l'entrée du musée.
Dans la première salle, une exposition présente affiches, photos, costumes et instruments utilisés lors des diverses cérémonies des Grammy Awards.
J'adore les affiches très pop et colorées des différentes éditions, et les photos noir et blanc du photographe officiel Danny Clinch (lui aussi récompensé...)
Diaporama : Affiches et photos du Grammy Museum de Cleveland
A noter que pour reconnaître Stevie Wonder , il suffit de la silhouette de son profil...
Le très beau Grammy utilisé dans l'une des affiches est bien sûr la réponse à la devinette du début de l'article...
Une merveille d'art cinétique
Les tenues rivalisent de paillettes, plumes, bling-bling et mauvais goût : le show-bizz américain dans toute sa démesure ! (de gauche à droite : Charli XCX, Cee Lo Green, Pharrell Williams et Mile Rogers, Katy Perry)
Diaporama : Tenues du show-bizz américain (Beyoncé, Kanye West, Elvis, Michael Jackson...),
Un Grammy Award de 1961 pour la chanson Moon River que vous pouvez écouter ci-dessous :
Dans la section "Iconic Instruments", exposition de plusieurs instruments de musique ayant appartenu à des artistes célèbres comme B.B. King, Miles Davies, Bob Dylan ou Bruno Mars...
Diaporama : Grammy Museum Iconic Instruments
Une autre section nous raconte l'histoire de la guitare électrique, où Fender (avec sa Telecaster d'abord puis sa Stratocaster 3 ans après) et Gibson (avec sa Les Paul) ont joué un rôle primordial.
Puis on entre dans les salles interactives avec moult consoles, "bars" et tableaux tactiles nous permettant d'écouter des œuvres primées en recherchant par titre, par interprète, par auteur, par compositeur, par année, par récompense... on pourrait y passer des journées entières !
Moi j'ai choisi d'écouter les Beatles : entre 1964 et 1996 (si on ne compte pas le trophée du couronnement de leur carrière en 2014), 23 nominations dont "Album de l'année" et "Meilleure performance vocale contemporaine par un groupe " pour presque tous leurs disques... et 7 trophées seulement ! (ok, ils ne sont pas américains...)
Ici une table à écran tactile longue de 5,5 mètres, surnommée "Crossroads Table",nous permet de découvrir l'histoire de la musique populaire et donne accès à des informations sur 160 genres musicaux.
Voilà ce que ça donne quand on clique dessus...
Ah ben oui, moi je n'écoute pas B.B. King (ni Plastic Bertrand, je vous rassure...) Il faut dire que Bruno Mars, qui a fait ses débuts dans le divertissement à l'âge de 4 ans en tant qu'imitateur d'Elvis Presley pour l'émission de variétés de son père, a déjà été nominé 27 fois (donc plus que les Beatles...) et a obtenu 7 prix depuis 2010.
La preuve !
Voici la section "studios de production"
Dans les mini-cabines, nous sommes accueillis par Keb 'Mo' qui nous aide à écrire, mixer, enregistrer et produire notre propre chanson de blues. Avec des capacités de mixage variées, on peut créer un hit et le stocker dans les archives du musée ! Bon, au moment du stockage, il faut donner plein d'infos persos... du coup, on a arrêté : tant pis pour la célébrité !
La salle Roland permet aux visiteurs de participer au processus de création musicale : en jouant des instruments de musique électroniques, on peut appréhender la façon dont la musique d'aujourd'hui est élaborée. De gauche à droite, j'ai reconnu toute seule Keith Urban, Kurt Cobain et Stevie Wonder... je ne suis pas aussi nulle que je le pensais !
Pour finir, on peut apprendre de nouveaux mouvements de danse avec Ne-Yo en suivant les cases qui s'éclairent sur une piste de danse colorée... Norbert est un peu circonspect sur ce coup-là !
C'est l'occasion de (re)découvrir la chronologie des styles de danse inspirés par la musique de leur époque...
D'ailleurs j'en profite pour boucler la boucle en vous proposant ce montage génial mettant à l'honneur des extraits chorégraphiques issus de l'âge d'or des comédies musicales et un titre de... Bruno Mars ! J'adore !
Il est déjà midi et nous assistons au repas de 2 écoles qui pique-niquent chacune à deux extrémités du vaste hall d'entrée... donc, ici, l'école des enfants blancs avec les profs blancs...
...et là, l'école des enfants noirs avec les profs noirs.. quand je vous disais qu'il y avait encore du boulot !
A l'extérieur, un jardin de sculptures qui font honneur à la musique : à gauche, Ramblin' Return de John Ellis et à droite Tribute to Stradivarius de Bryan Massey
Et en face, une Ohlala comme en Louisiane... mais sans la mousse espagnole !
60km plus loin, nous arrivons, toujours sous la pluie, à Clarksdale, autre ville mythique du Blues.
Clarksdale est notamment célèbre pour son panneau Crossroads qui marque le croisement des Highway 49 et 61, le lieu légendaire où le bluesman Robert Johnson aurait vendu son âme au diable en échange de son extraordinaire talent de guitariste, comme il le raconte dans sa chanson intitulée -vous l'auriez deviné- "Crossroads" (oui je sais, sur le lien, c'est la reprise de Clapton... je préfère !)
On y trouve également le Delta Blues Museum... qui est fermé, on ne sait pas pourquoi! (et puis de toutes façons, photos interdites à l'intérieur...)
Et surtout, le mythique Ground Zero Blues Club (387 Delta Avenue), juke joint pur jus, à la façade décrépie bien peu engageante, et pourtant listé dans le "top 100 des bars et night clubs d'Amérique" ... c'est là, bien sûr, que nous avons l'intention de manger !
Ground Zero parce que Clarksdale est considéré comme l'endroit où le blues a commencé : c'est le point zéro de l'émergence de la musique de Muddy Waters, pionnier du blues et originaire du coin...
Dès l'entrée, on en prend plein les mirettes
C'est une débauche de couleurs et de décorations hétéroclites couvertes de graffitis ! Les clients ont en effet le droit de barbouiller murs, affiches, tables, chaises, comptoir etc... de leur nom et de petits messages... D'ailleurs, à peine arrivés et la serveuse nous apporte un feutre indélébile pour nous permettre de jouer nous aussi !
Du coup, on ne s'en est pas privé !
Moi, j'écris le mien sur la scène... Malheureusement pas de prestation le midi : pour profiter de la musique live, il aurait fallu venir un soir, entre le mercredi et le vendredi...
Le bar est une merveille dans le style destroy...
Originaire de Clarksdale, guitariste à ses heures, l'acteur Morgan Freeman, qui est à l'honneur ici, est en fait l'un des co-propriétaires du club qu'il a ouvert en 2001 afin d'avoir "un bon endroit où manger et écouter de la musique quand il revient chez lui" !
Diaporama : les guitares déco du Ground Zero Blues Club
On nous apporte le menu et les prix modiques nous étonnent... on est un peu inquiets quant à la qualité des plats que l'on va nous servir ! Je choisis le Real Deal Sammich et Norbert le Fried Catfish...
Et en fait on va se régaler ! Les effilochés de porc lentement grillés au barbecue sont hyper fondants, les accompagnements sont originaux, la bière excellente...
...même la panure du catfish de Norbert est croustillante et savoureuse ! Bref, on prend notre temps parce qu'on passe un excellent moment !
L'extérieur est tout aussi extravagant. En principe, il y a plein de canapés déglingués sous le porche mais là, avec la pluie, ils ont dû les rentrer...
Le mauvais temps ne nous permet pas non plus de faire une balade à pied dans Clarksdale pour voir ses quelques fresques... on va se contenter de passer en voiture à côté de celle-ci...
et de ce snack original...
On pourrait facilement rentrer chez nous en tournant à gauche mais non... Memphis nous attend et la journée n'est pas terminée !
BONUS FAMILIAL
Diaporama : Nous à Cleveland et Clarksdale
→ Pour voir toutes mes photos du Mississippi en grand format, cliquer ici
A peine arrivés à Memphis, pèlerinage urgent obligatoire !
Première ville à attirer les noirs du Delta chassés des plantations par la mécanisation de la culture du coton et cherchant à gagner leur vie en jouant leur musique, Memphis fut le foyer initial du blues urbain. Plus tard, grâce au développement de l'industrie du disque, elle va gagner différents surnoms : "Home of the Blues", "Soul City" , "Birthplace of Rock'n’roll"... bref, la ville a pour reine la musique et pour palais ses studios d'enregistrement !
De Clarksdale à Memphis, le ciel continue de nous tomber sur la tête, à tel point que nous passons dans l’État du Tennessee sans repérer le panneau !
Nous rejoignons Memphis à 16h : juste le temps de faire le check-in et de poser nos valises, nous profitons d'une accalmie pour repartir à pied.
Exceptionnellement, nous avons fait une réservation par nous-mêmes au "Quinta Inn and Suites Downtown" afin de profiter d'un hôtel bien placé avec un parking gratuit... les parkings des hôtels de centre-ville sont en effet hors de prix aux USA (40 à 45$ par jour + le tip au voiturier), on est contents de pouvoir faire cette économie sur 3 nuits ! Et déjà on apprécie le poster de l'accueil !
D'ailleurs tous les murs des couloirs de l'entrée sont décorés de posters de Memphis, c'est super beau.
On trouve notre chambre très classe...
L'hôtel offre aussi l'avantage de se situer à 800m de Sun Studio (706 Union avenue), endroit de légende où le blues, le gospel et la country ont fusionné pour donner naissance au Rock'n'roll, seul studio d'enregistrement classé au registre national des lieux historiques... Grâce à cette proximité, nous pouvons faire la dernière visite guidée de la journée à 17h.
L'entrée est un bar-gift shop qui nous met tout de suite dans l'ambiance...
On peut se restaurer en attendant le départ du tour guidé...
...où l'on va tout apprendre sur l'histoire du studio, initialement dénommé le Memphis Recording Service et fondé en 1950 par Sam Phillips, un jeune ingénieur du son de 27 ans désargenté qui nourrissait une passion pour la musique noire du Sud des États-Unis et souhaitait donner leur chance aux artistes méconnus, comme B.B. King ou Howlin' Wolf.
Trois événements vont faire de ce studio une légende en marquant l'histoire de la musique américaine : le premier en 1951, quand Jackie Brenston accompagné de ses Delta Cats -avec Ike Turner au piano- gravent ici "Rocket 88", considéré comme le premier morceau de rock'n'roll de tous les temps. Le succès de la chanson (que vous pouvez écouter ci-dessous) permit à Sam Phillips de lancer en 1952 le label Sun Records qui se démarquait de ses concurrents en proposant un tout nouveau style musical.
Pour connaître les deux autres anecdotes, passez la porte et suivez-nous dans notre visite du musée...
A l'étage, une grande salle garnie de vitrines où sont exposés divers objets racontant l'histoire du studio : disques vinyles, micros vintage, instruments de musique, graveurs, néons, magnétophones-à-bandes, affiches, photos...
Ici Rosco Gordon Jr dont la façon unique de jouer du piano, en mettant l'accent sur les contretemps, a inspiré les rythmes du reggae jamaïcain.
Là, un groupe de prisonniers d'un pénitencier de l'Etat du Tennessee dont le succès du disque " Just Walkin' in The Rain" leur a permis d'obtenir la grâce du Gouverneur !
Une Lucille car c'est ici que B.B. King a commencé à se faire connaître
Bien sûr, Jackie Brenston et Ike Turner sont à l'honneur... La visite est d'ailleurs musicale : à chaque fois que le guide explique un pan d'histoire, il lance l'enregistrement qui s'y réfère.
Un graveur de 1950
Mais la star du studio, c'est ce jeune inconnu de 18 ans qui, un jour de juillet 1953 (deuxième événement !), a poussé la porte et demandé à Marion Keisker, l’assistante de Phillips, une session personnalisée tarifée à 3,25$ pour enregistrer deux chansons en guise de cadeau d’anniversaire à sa mère, Gladys. Suivait alors un dialogue devenu célèbre où Keisker demande au jeune homme : « Quel type de chanteur êtes-vous ? ». Réponse : « Je chante tout ». Keisker insiste : « Comme qui chantez-vous ? » Et Elvis Aaron Presley, le futur King, de répondre : « Je ne chante comme personne d’autre ». Phillips n'est pas particulièrement conquis par Presley mais Keisker, elle, croit en lui...
Un an après, Bébé Elvis enregistrait « That’s All Right (Mama) ». Trois jours plus tard, à la radio, le DJ Dewey Phillips jouait la chanson lors de son émission « Red, Hot & Blue ». Assailli de coups de téléphone d’auditeurs enthousiastes, il passait le titre à 14 reprises ! Le succès d’Elvis était fait. En moins de deux ans, Sam Phillips fit d'un parfait inconnu qui ne s'était jamais produit en public l'artiste le plus recherché des USA.
Du coup, le roi du rock'n'roll est partout : photos,
disques,
même sa guitare dans un bel étui en cuir
et la régie de la station de radio qui a passé pour la première "That's all right".
Ensuite on redescend au rez-de-chaussée pour rejoindre le Saint des Saints (je n'exagère pas, le slogan du Sun Studio est : "Si la musique était une religion, Memphis serait Jérusalem et le Sun studio son principal sanctuaire"!) : la salle d'enregistrement proprement dite, sol en lino, murs en plaquage formica, tapis élimé...
Ici trône la photo que nous avons vue un peu partout dans le musée et qui immortalise le troisième événement lié à la renommée du studio .. En effet, la bonne intuition de Sam Phillips lui a fait découvrir d'autres stars qui ont enregistré des titres de renommée mondiale. Le 4 décembre 1956, Carl Perkins (Blue Suede Shoes) répétaitau sein du studio en compagnie d’un jeune pianiste encore inconnu, Jerry Lee Lewis (Great Balls of Fire). Elvis, de passage dans les parages, venait alors les saluer, bientôt rejoint par Johnny Cash (Walk the Line). Les quatre musiciens débutèrent alors un « bœuf » improvisé de plus de trois heures, immortalisé sur bande-son, mais aussi sur une photo devenue célèbre et vite baptisée le « Million dollar quartet » (pour écouter cet enregistrement improvisé, cliquer sur la photo ci-dessus.)
Pas facile de voir la régie derrière la vitre.
Tout autour de la salle, des instruments de légende ayant été utilisés par les stars du studio... en fait, on se croirait dans la pièce à musique de notre garage ! Cliquez ici et ici et vous verrez que je n'exagère pas !
Ah ben oui, tout pareil !
Il y a même la batterie, comme chez nous ! (sauf que celle-ci, elle a été utilisée par U2...)
Comme on peut le voir sur cette photo, des stars actuelles viennent en effet régulièrement enregistrer au Sun pour se faire une piqûre de lieu de légende.
ça aussi, on a... (si, si je vous assure !)
Le guide nous présente le premier micro dynamique utilisé par Elvis et par bien d'autres stars (bonjour les microbes !), etnous montre comment Johnny Cash transformait sa guitare en instrument de percussion à l'aide d'un billet coincé derrière les cordes (la batterie n'étant pas utilisée, à l'époque, dans la musique Country)
Le moment le plus rigolo, c'est quand les visiteurs s'approprient le fameux micro vintage (plein de microbes, donc) pour singer Elvis avec force grimaces et jeu de jambes... on se moque copieusement et puis... on fait exactement pareil !
Diaporama : même pas honte ! (et même pas peur des microbes...)
Retour à l'hôtel pour trier les photos et, après le pique-nique du soir, nous repartons pour une petite balade nocturne sur Beale Street.
(Pour écouter "Just Walkin' in the Rain" des Prisonaires pendant notre balade dans Beale Street...)
Nous logeons à proximité du stade de baseball des Redbirds, d'ailleurs on s'inquiétait un peu des nuisances sonores nocturnes pour ce week-end mais en fait, les festivités aux USA commencent et se finissent toujours très tôt en soirée.
En plus, on va constater rapidement que la police est partout dans le centre-ville : les accès à Beale Street sont même filtrés avec ouverture des sacs... On croise par ailleurs beaucoup de homeless... Finalement, on va se sentir moins en sécurité qu'à la Nouvelle-Orléans.
Donc Las Vegas a le "Strip", La Nouvelle-Orléans a "Bourbon Street" et Memphis a "Beale Street", la grande rue de 2.5 km où tout a commencé en 1841... Elle a été baptisée ainsi en hommage à un soldat héros de la guerre civile longtemps oublié depuis… Au départ, elle servait essentiellement à relier les commerces du downtown aux navires chargés de marchandises qui arrivaient par le Mississippi.
A partir des années 1900, les afro-américains libres investissent Beale Street en y ouvrant restaurants, bars et commerces, et de nombreux artistes noirs viendront y tenter leur chance jusqu'en 1960. Nombre d’entre eux fermeront ensuite boutique malgré une loi proclamant la rue « berceau du Blues » en 1966. Mais ce n’est qu'en 1980 que la célèbre rue (re)deviendra une des attractions principales de Memphis.
Donc, comme sur Bourbon street, succession de bars et de restaurants avec musique live partout et population "cocktailisée"... mais la rue est quand même moins bruyante que celle de la Nouvelle-Orléans.
Par contre, beaucoup plus bling bling ! Les néons des enseignes rivalisent de couleurs et de clignotements, on retrouve ici un côté Las Vegas dans la débauche de lumières !
Diaporama : Beale Street
Le B.B. King Blues Club (143 Beale Street), ouvert en 1991, est devenu une véritable institution avec, tous les soirs, des concerts de blues, soul et rock'n'roll et une piste de danse où on peut guincher jusqu'à 1h du matin (quand je vous disais que les américains se couchaient tôt...)
Pour éviter de vous inquiéter inutilement avec l'expression du visage de Norbert, j'ai préféré vous mettre la légende directement sur la photo...
En prologue, je dois vous avouer que nous aimons bien Elvis (voix chaude, jeu de jambe sexy, belle gueule et standards incontournables du Rock’n’roll) mais il serait exagéré de dire que nous sommes des fans énamourés venus ici en pèlerinage... Du coup, nous avions envisagé la visite de Graceland comme un passage obligé et kitch, avec curiosité et scepticisme... et finalement nous y sommes restés quatre heures !
Pour écouter un medley des standards d'Elvis pendant que vous lisez l'article, c'est ici !
Il faut d'abord passer le cap douloureux d'un billet d'entrée à 61$ (55$ pour les seniors)... avec des formules plus chères encore pour les VIP ! Malgré le prix, c'est la deuxième résidence privée la plus visitée des USA après la Maison Blanche (près de 700.000 visiteurs par an en 2019).
Elvis a acquis cette propriété en 1957, à l'âge de 22 ans, pour y loger sa famille : ce petit gars né en 1935 dans un foyer pauvre à Tupelo (Misissippi) avait toujours promis à ses parents qu'il leur achèterait une belle maison !
C'est une demeure construite en 1939 dans le style néocolonial, qu'il a payée à l'époque 102 500$ avec les revenus de son premier disque d'or "Heartbreak Hotel" et de deux succès cinématographiques, et qui portait déjà le nom de Graceland. Il y vécut pendant 20 ans entouré des siens : sa femme Priscilla jusqu'à leur divorce, sa fille Lisa Marie, sa grand-mère Minnie, ses parents Vernon et Gladys (bien que sa mère en ait peu profité puisqu'elle est morte en 1958... remarié, son père continua à habiter la maison) mais aussi ses oncles et tantes, cousins, amis... il y avait toujours une quinzaine de personnes autour de lui à Graceland.
La visite de Gracelandcommence donc par un tour guidé du manoir, des jardins et du mémorial où on nous emmène en navette à partir de l'entrée du musée situé de l'autre côté de la rue. La demeure comprend 24 pièces au total, dont 8 chambres avec salle de bain, et 17 ha de jardin. Toutefois, on ne visite pas le premier étage qui reste le domaine privé de la famille Presley.
D'ailleurs il parait que dans la chambre du King, tout est resté en l'état après sa mort... (photo prise sur le net) Et vous pouvez déjà constater comme Elvis avait des goûts simples et austères en matière de déco !
On nous a distribué à chacun une tablette tactile interactive raccordée à des écouteurs, aussi notre visite est commentée pièce par pièce en français tandis que l'écran affiche l'endroit où l'on se trouve, comme ici, sur ma tablette, le hall d'entrée...
La visite se fait par groupes successifs mais on ne sent pas bousculés par le staff et on peut visiter à notre rythme, bien qu'on soit un samedi.
Alors, c'est vrai que c'est kitchissime à souhait, que les couleurs sont parfois violentes et que les miroirs sont omniprésents... mais franchement, moi j'ai trouvé la déco plutôt belle (faut dire que j'adore le bleu et les vitraux art nouveau). En fait j'ai ressenti la même impression qu'à Las Vegas : Too Much mais magnifique ! Dans le salon, le canapé fait quand même plus de 4m de long... Au fond, dans la "Music room", on aperçoit le Knabe, piano blanc qu'Elvis avait acheté en 1958 : vendu en 1976, il est passé par plusieurs propriétaires avant que Graceland le rachète aux enchères en 2017 pour lui faire réintégrer sa place initiale.
Au rez de chaussée, on peut aussi voir la salle à manger (Elvis a eu des périodes rouges et des périodes bleues au niveau de la déco... comme Picasso !)
et la chambre de Vernon et Gladys.
Comme dit plus haut, les miroirs sont partout, ce qui rajoute à l'impression de surcharge décorative.
Ensuite on descend au sous-sol pour un tour du côté de la cuisine (identique à celle de mes beaux-parents, avec la même télé !) C'est là qu'Elvis devait préparer son diététique sandwich préféré composé de beurre de cacahuète, bacon frit, banane et margarine... A noter, à droite, le tout premier micro-onde vendu à Memphis.
Puis on va s'abimer les yeux dans la rutilante salle " multimedia" jaune et bleue où Elvis avait installé 3 télés pour faire comme le président Johnson et regarder plusieurs émissions différentes en simultané tout en écoutant un vinyle et en lisant un bouquin... infatigable !
Cette fois les miroirs sont au plafond ! Super reposante cette pièce !
A côté, une salle de billard entièrement décorée de tentures plissées
300 mètres de tissu quand même ! (moi je trouve ça superbe mais je me pose des questions sur les techniques de ménage à adopter pour entretenir tout ça !)
L'apothéose extravagante de la visite avec la Jungle room, bois rouge sculpté, rideaux or volantés, revêtements en peaux de bêtes, moquette verte partout, même au plafond... sa pièce favorite, où il recevait ses amis et qui lui a servi de studio d’enregistrement pour deux albums. L'escalier du fond la reliait directement à sa chambre. Bref, cette room-ci mérite bien un petit diaporama !
Diaporama : Graceland, la Jungle room
A l'arrière de la maison, on découvre les jardins
et une des passions du King, les chevaux...
avant de rejoindre d'autres bâtiments pour la visite du petit musée dédié à l'histoire de la famille Presley, avec plein de photos et d'objets personnels... Par contre, on se balade dans un conte de fée : aucune mention de ses addictions (malbouffe et médocs), de son douloureux divorce d'avec Priscilla, aucune image de sa période Sumo, même les véritables circonstances de sa mort sont enjolivées (on nous dit qu'il a été foudroyé par une crise cardiaque dans sa salle de bain... bon c'était un peu moins glamour en vrai... en France on pourrait dire " le King est mort sur son trône", ça resterait sexy mais je ne sais pas si ça marche en anglais !), bref tout est lisse, policé, rien ne doit ternir la légende de l'étoile du rock...
Diaporama : Graceland, photos d'Elvis
Rising Sun était le cheval préféré d'Elvis, un palomino à la robe dorée acheté en 1967.
Une autre de ses passions, les armes à feu.
Les tenues de son mariage avec son unique épouse, Priscilla Beaulieu, qu'il a rencontrée lorsqu'elle avait 14 ans et épousé 7 ans après... là aussi, on ne nous dit pas qu'il avait déclaré à un copain “Elle est assez jeune pour que je puisse en faire ce que je veux”... Il l'a même fait teindre en brun corbeau et coiffer avec une choucroute sur la tête comme lui ! D'ailleurs elle se surnommait elle-même "la poupée vivante d'Elvis" ! (Bon, allez, j'arrête d'écorner le mythe !)
Parmi les objets personnels de la famille, la gourmette de la petite Lisa Marie
que voici...
C'est bien la même qui a fait semblant ensuite de former un couple normal avec Michael Jackson, dont certains disent qu'il l'aurait épousée pour éloigner de vils soupçons et mettre la main sur l'héritage d'Elvis... (ah non, je ne vais pas me mettre à écorner un deuxième King maintenant ! Mais ça va être quoi, ensuite ? Que la guitare de B.B. King ne s'appelait pas vraiment Lucille mais Georgette ? Ou que Plastic Bertrand ne s'appelait pas vraiment Plastic ? Allons, un peu de retenue quand même !) Bon, tout ça pour dire que dans le monde artistique, il est souvent préférable de dissocier l’œuvre de la personne, et de ne s'attacher qu'au génie et au talent...
Graceland a subi... euh bénéficié de plusieurs décorations différentes en 20 ans : ici la période rouge et or des années 70.
La preuve !
On visite aussi sa salle de Racket Ball, attenante à une salle de musique où étaient accrochés ses disques d'or. C'est d'ailleurs à la suite d'une séance de ce sport similaire au squash qu'Elvis a trouvé la mort à l'âge de 42 ans, décès prématuré dû vraisemblablement à la conjugaison d'une mauvaise hygiène de vie, d'un abus de médicaments et d'une maladie chronique induisant des problèmes cardiaques et digestifs...
Une piscine pas vraiment très grande... Finalement on se dit que dans cette propriété, on a vu de l'extravagance mais pas de la démesure... en tous cas, moins qu'on ne l'imaginait. Et on ressort de la visite avec le sentiment qu'Elvis était en fait un bon petit gars généreux qui aimait beaucoup sa famille et qui n'a jamais pu se remettre vraiment du décès de sa mère disparue à 46 ans et avec laquelle il entretenait une relation fusionnelle...
On termine le tour de cette demeure par le Jardin de la Méditation où Elvis repose en compagnie de sa famille...
Au premier plan, on découvre avec surprise qu'Elvis avait un frère jumeau, Jessie, arrivé mort-né avant lui...
Sur la tombe d'Elvis un texte rend hommage à une "légende vivante qui a révolutionné la musique", et c'est vrai qu'Elvis a connu la gloire internationale de son vivant sans jamais avoir fait de concert hors des USA...
Ici aussi, on ne donne pas vraiment dans la simplicité...
(la stèle se trouvait préalablement dans un cimetière mais les tombes ont été rapatriées à Graceland par crainte de vandalisme)
...mais j'aime bien à nouveau la déco en vitraux...
Pour continuer la visite, nous rejoignons l'autre côté du boulevard en longeant les deux jets privés d'Elvis, un quadriréacteur Convair 880 luxueusement aménagé et portant le nom de sa fille, et le Lockheed Jet Star surnommé "the Hound Dog II".
Et voilà le hall d'exposition où nous avons passé le plus de temps, le "Elvis Presley Automobile Museum" qui présente aux visiteurs extasiés dont nous faisons partie une vingtaine de ohlalas motorisées ayant appartenu au King... et en plus c'est midi alors on est tout seuls !
Se contenter de dire qu'Elvis aimait les voitures serait en-dessous de la réalité... il en a possédé des centaines ! Et nous qui ne sommes pas particulièrement passionnés par les véhicules d'aujourd'hui, par contre on adooooore les anciens modèles... du coup cette visite est un régal pour nos yeux. Donc voici un extrait des merveilles exposées ici, avec parfois de petits diaporamas parce que c'est comme pour les maisons, quand j'aime, je prends des photos sous tous les angles !
La Lincoln Continental Mark II de 1956 qu'Elvis affectionnait particulièrement. Il l'a achetée à Miami pour remplacer une autre Lincoln qui avait été décorée de numéros de téléphone et de traces de rouge-à-lèvres par des admiratrices un peu trop ferventes... Il l'a utilisée pour le tournage du film "King Creole".
Cadillac Eldorado Biarritz de 1956. Toute blanche à l'origine, Elvis l'a fait customiser à son goût, avec air conditionné et sièges en cuir blanc. Pour la couleur de la carrosserie, la légende raconte que le King a demandé de la repeindre de la couleur de la grappe de raisin qu’il tenait dans sa main !
MGA 1600 Mkl de 1961, petit roadster décapotable du film "Blue Hawaï" qu'Elvis a acheté à la fin du tournage. Par la suite, il l'a donné à sa secrétaire !
La Rolls-Royce Silver Cloud III de 1966 qu'Elvis a achetée à l'acteur Michael Landon et qu'il donnera au chanteur Charlie Rich.
Deux Mercedez Benz Pullman 600 dont la limousine "Midnight Blue" de 1969 munie d'une TV et d'un téléphone.
La Lincoln Mark IV de 1975 avec ses initiales sur les portières.
La Dino Ferrari 308 GT4 achetée d'occasion en octobre 1976 pour 20 583 $. Ce sera la dernière voiture que le King s'offrira, puisqu'il décèdera moins d'un an après.
Mais le clou de l'expo, c'est la fameuse Cadillac rose qu'il acheta en 1956 et donna à sa mère... qui n'avait pas le permis !
Une Fleetwood Sixty Special de 1955 dont il ne s'est jamais séparé...
Dans une pièce adjacente, d'autres très belles mécaniques possédées par le King nous font de l’œil... Sont exposés ici des Harley, des motos 3-roues, des buggys, des snowmobiles (vu qu'il neige très souvent dans le Tennessee comme chacun sait !), des voiturettes de golf, une voiture à pédale, une Jeep rose pour circuler sur sa propriété... si vous êtes bien attentifs, vous verrez même sa première luge !
Diaporama : Elvis' cycles
Nous continuons avec les salles d'expos qui retracent sa vie et sa carrière : ses 2 ans de service militaire en Allemagne, ses extravagants costumes de scènes, des objets personnels, des vidéos de concerts ou de films, des documents d'archives...
Diaporama : tenues d'Elvis dont la fameuse combi "Eagles" et une autre avec le calendrier Aztèque ! On n'a vu toutefois aucune tenue de fin de carrière, la période Sumo de sa vie est ici aussi totalement occultée...
Ici les affiches des 30 films qu'il a tournés et qui donnent tout son sens au mot "navet"...
Il faut dire que le seul objectif de ces bluettes était de promouvoir de nouvelles chansons et de vendre des disques... Beaucoup ont toutefois connu un succès faramineux :en 1956, "Love Me Tender" (le premier film d'Elvis, un western) est présenté à New York ou il rembourse en 3 jours les coûts de production et pulvérise tous les records d'audience !
Plus un disque d'or dans la foulée !
A noter que Love Me Tender est une reprise d'une vieille chanson de la guerre de Sécession composée par W. W. Fosdick & George R. Poulton's : "Aura Lee" (ou "Aura Lea"). Chanson qui deviendra également, avant Elvis, un hymne en fanfare de l'armée américaine sous le titre "Army Blue" !
Elvis adorait tourner les films à Hawaï, il a d'ailleurs décoré sa Jungle room en souvenir de l'archipel (notez la "romance extatique" quand même !)
Une guitare de ses débuts dont le bois affiche l'usure causée par les frappés... Sa toute première lui avait été offerte par sa mère à l'occasion de ses 11 ans, elle l'avait acquise pour la modique somme de 12,95 $. Grosse déception pour Petit Elvis qui avait demandé soit une bicyclette, soit une carabine 22 Long Rifle... mais c'était trop cher pour les Presley... on l'a échappé belle !
Une autre exposition est dédiée aux stars "icônes" de la musique qui ont révélé avoir été influencées par le King, comme John Lennon qui a quand même déclaré : "Rien ne m'avait vraiment touché avant que j'entende Elvis. S'il n'y avait pas eu Elvis, il n'y aurait pas eu les Beatles". Le piano exposé est un des derniers pianos de John.
Diaporama : Graceland, quelques stars influencées par Elvis (Jennifer Lopez, Dwayne Johnson "The Rock", les Kiss..)
La salle des trophées expose une prodigieuse collection de disques d'or et de platine !
En effet, 91 albums et 53 singles du King ont reçu des distinctions : or (500 000 exemplaires), platine (1 million), double-platine ou diamant (l'album où Elvis chante Noël aurait vendu jusqu'à 18 millions d'exemplaires !)
Voici son premier disque d'Or.
Heartbreak Hotel est une chanson inspirée par un fait divers rapporté par un journal de Miami : un jeune homme s’est suicidé, laissant derrière lui une note disant « I walk a lonely street ». Vous remarquerez que le disque n'a pas été édité sous le label Sun... et oui, en 1956, Phillips a accepté de vendre le contrat d'exclusivité qui le liait à Elvis à la maison de disques RCA pour 40 000 $, argent qui lui permettait de continuer à promouvoir des artistes de blues issus de la communauté noire... Mais rassurez-vous, la visite du studio RCA est prévue dans notre roadtrip !
Pour écouter Heartbreak Hotel, c'est ici !
Chaque fois qu'on sort d'une salle d'expo, passage obligé par un gift shop !
Alors là, ce sont des horloges et les jambes d'Elvis bougent en guise de balancier... la classe !
On termine notre Elvis Experience avec un hamburger au Gladys' Diner, déco vintage sympa !
Ah ben si, on a fini par le trouver notre Elvis période Sumo ! Mais pas dans Graceland... dans un gift shop situé à l'extérieur du complexe, de l'autre côté du boulevard, où tout est bien moins cher... (on avait garé gratuitement notre voiture sur son parking)
Et on continue notre tournée des lieux de légende...
Vous pensiez peut-être qu'après avoir passé 4h dans Graceland, on serait lassés des musées pour la journée ? Que nenni ! A peine 10mn de voiture et nous voici dans Soulsville pour visiter le Stax Museum, temple de la Soul Music. Un petit tour que je vous propose en musique, à l'image de notre propre visite, puisque nous sommes baignés des sons du Rythm'n'Blues crachés par des haut-parleurs extérieurs dès le parking du musée !
Une vidéo qui met bien dans l'ambiance de la visite du musée... avec Sam § Dave, Otis Redding, Carla Thomas et Wilson Pickett.
Nous traversons Soulsville, ancien ghetto noir de Memphis qui n'est toujours pas un quartier vraiment reluisant aujourd'hui...
Heureusement, la Soulsville Foundation fait un gros travail de réhabilitation du quartier, c'est elle qui est à l'origine de la création du musée (en 2003) mais aussi de la Stax Music Academy et de la Soulsville Charter school, école préparatoire musicale gratuite qui accueille 700 lycéens et affiche 100% de réussite aux examens ! Tous les bénéfices du musée reviennent d'ailleurs à cette association.
A notre arrivée sur le parking (où on n'est pas très nombreux), on a l'impression d'être toujours à Graceland dans le Hall d'exposition des voitures d'Elvis ! On se prend sur la tête une brusque averse mais, heureusement, le soleil sera revenu à notre sortie du musée... bien organisé ce voyage !
Le Stax Museum of American Soul Music (926 East McLemore Avenue) est donc situé à l'emplacement de l'ancien siège de Stax Records. Il est consacré à l'histoire du label discographique et de ses artistes phares.
Stax Record est une maison de disques qui a fonctionné de 1958 à 1975, date de son dépôt de bilan pour cause de mauvaise gestion et de poursuites en justice (par des créanciers et des accusations de pots-de-vin envers des stations de radio...)
D'abord nommé Satellite Records, le label a ensuite pris le nom de Stax avec la jonction des 2 premières lettres de ses fondateurs, Jim Steward, jeune blanc amateur de country music, et sa soeur Estelle Axton.
Ci-dessus, les deux logos utilisés par le label, à gauche le "Stax o' wax" (1962-1968) et à droite le "Snappin' fingers" (1968-1975) qui a été adopté après la mort de Martin Luther King..
A partir de 1960, Estelle et Jim louent pour 100$ par mois une vieille salle de spectacles à Memphis, l'ancien Capitol Theater, transformée en église puis abandonnée... Leur équipe la transforme en studio avec des équipements rudimentaires et des aménagements de fortune.
La porte du studio reste toujours ouverte à qui veut apporter quelque chose. C'est ainsi que la musique va rendre possible ce mélange racial que la société refuse.
Estelle a eu l'excellente idée de transformer le stand de vente de bonbons et pop corns en un magasin de disques : le Records Satellite Shop. Pour faire la promotion de leur studio, elle sort les enceintes sur le trottoir. Il ne faut pas longtemps pour que le lieu devienne le QG de gamins qui viennent écouter et danser sur les nouveautés. Mais surtout un aimant qui va attirer les jeunes musiciens, noirs et blancs, parmi les plus doués de la ville et de leur génération.
Car malgré sa courte existence, Stax -puis sa filiale Volt- est devenu, au même titre que Motown à Detroit, un des labels les plus populaires de tous les temps. Dans les années de sa splendeur, Stax accompagna quantités d’artistes comme Otis Redding, Isaac Hayes, Booker T. & the MGs, Rufus et Carla Thomas, Johnnie Taylor, Sam & Dave, Albert King, les Staple Singers... intégrant de manière indélébile la soul et le rythm’n’blues dans le patrimoine musical de Memphis, le faisant connaître à toute la planète, en produisant plus de 800 singles et près de 300 albums dans les années 1960-1970, et faisant fi de la ségrégation alors en vigueur, blancs et noirs collaborant ensemble au studio.
En 15 ans, Stax a placé plus de 167 chansons à succès dans le Top 100 des charts pop, et 243 tubes dans le Top 100 des charts R&B.
Toute l'histoire du label nous est ainsi racontée dans un film primé qui précède la visite du musée.
Ensuite, comme dans les autres musées visités sur cette route du blues, ce sera des expositions d'instruments, de costumes de scène, de disques, d'objets et souvenirs personnels des stars, de photos, d'affiches... tout ça accompagné de vidéos avec des écrans partout et des stations d'écoute pour se faire plaisir en musique.
Mais ce que j'ai trouvé le plus intéressant, c'est que le musée s'attache d'abord à mettre à l'honneur l'influence du Gospel sur la soul, avec une véritable église de 1906 amenée du Delta du Mississippi et re-assemblée ici...
et surtout à ancrer l'histoire du label dans le contexte d'une époque mouvementée de combat pour les droits civiques en révélant que Stax va non seulement lancer la soul music dans les années 60 mais aussi devenir l'un des fers de lance du militantisme afro-américain. Par ses artistes politiquement engagés bien sûr...
mais aussi parce que la maison va accueillir en temps que groupe en résidence, un quatuor instrumental mixte, Booker T & the MGs, deux blancs et deux noirs qui collaboraient musicalement alors qu’ils ne pouvaient même pas aller ensemble au restaurant ! Avec le renfort des cuivres des Memphis Horns, ils vont accompagner l'enregistrement de la plupart des chanteurs stars du studio.
Il faut dire que, comme nous le révèlent ces documents, c'était une époque où il y avaient une compagnie d'ambulances pour Blancs et une autre pour Noirs, et des heures d'ouverture des lieux publics ou récréatifs réservées au Noirs... Le révérend Dwight raconte même qu'il a vu mourir sur le trottoir une femme blanche alors qu'une ambulance pour Noirs était sur place mais ne pouvait pas la prendre...
Le musée met également à l'honneur plusieurs figures légendaires de la soul et du R§B, même s'ils avaient signé avec d'autres labels, comme ici Tina et Ike Turner, robe à sequins, blouson pailletté, guitare Fender Telecaster...
Aretha Franklin, The Queen Of Soul, née dans ce quartier de Memphis ou Mary Wells, popularisée en Europe grâce au titre "My Guy".
Les labels de disques du Chicago Blues, avec les grands Ray Charles, James Brown ou Sam Cooke
Et bien sûr, ceux qui ont fait l'histoire de Stax Records... histoire que j'ai choisi de vous raconter à l'aide de 5 titres-clés qui ont fait la légende de ce label...
1/Rufus Thomas & Carla Thomas : « Cause I Love You » - 1960
A l’époque, Rufus Thomas est une petite star de Memphis - à la fois musicien, chanteur, DJ, comique et danseur - qui se définit comme « le plus vieil adolescent du monde » et considéré comme un des fondateurs du rythm & blues moderne. Le patron de Stax, malin, se dit qu’enregistrer un disque avec Rufus sera le prétexte pour que ce dernier le diffuse dans son émission de radio et fasse connaître le label. Et il voit juste ! Enregistré avec la fille de Rufus, « Cause I Love You » est le premier titre vocal signé Stax à connaître un énorme succès. Au point que l’imposant label Atlantic Records va soudainement s’intéresser à Stax et le distribuer à travers toute l’Amérique, lui offrant un rayonnement précieux.
2/Mar-Keys : « Last Night » - 1961
Ce sont le guitariste Chips Moman et le claviériste Jerry Lee "Smoochy" Smith qui jettent les bases du morceau en improvisant pendant une pause lors d'un concert où ils jouaient ensemble. Chips Moman développe le morceau dans les studios du label Satellite avec plusieurs musiciens des Mar-Keys qui apportent leurs contributions à la composition. L'enregistrement se fait en plusieurs fois avec différents musiciens suivant les sessions.
A noter que les Mar-Keys étaient un groupe blanc qui jouait du Rythm'n'Blues, ce qui n'était pas forcément bien vu à l'époque...
C'est le joueur de saxophone baryton Floyd Newman (le plus proche du micro !) qui prononce les mots "Oh Yeah", seul vocal du morceau !
3/Booker T & The MG’s : « Green Onions » - 1962
Booker T. Jones, jeune noir de 19 ans habitué de la boutique de disques attenante au studio, est un prodige de la musique qui ose un jour passer la porte de chez Stax pour proposer son aide. Bassiste de formation, il sait jouer de tout, de la guitare au trombone, mais c’est son aisance aux claviers qui va le rendre célèbre. Entouré d’un autre musicien noir, Al Jackson à la batterie, et deux blancs, Steve Crooper à la guitare et Donald Dunn à la basse, ils décident, en attendant un chanteur qu’ils doivent enregistrer, de jammer. En sort un instrumental incroyable porté par le premier groupe vraiment mixte de l’histoire de la musique américaine qui résume pile-poil la philosophie de Stax : s’entourer des meilleurs musiciens sans considération de la couleur de peau.
4/Sam & Dave : « Hold On, I’m Coming » - 1966
Signé sur Atlantic Records, ce jeune duo prometteur voit d’un très mauvais œil le désir de leur maison de disque de les envoyer enregistrer à Memphis dans les studios de Stax, eux qui rêvaient d’un studio dernier cri à New York.
Mais avec Isaac Hayes au piano et David (Dave) Border aux paroles auxquels se rajoutent les musiciens réguliers du studio, ce grand mix va donner des merveilles. L’histoire raconte que Dave serait parti aux toilettes au moment où Isaac tenait aux claviers un "groove" qu’il ne voulait pas lâcher, et qu'il lui aurait crier de revenir vite derrière le micro. Ce à quoi Dave, revenant précipitamment avec les pantalons sur les genoux, aurait répondu « Hold on, I’m coming » qui deviendra le refrain d’un tube monstrueux et lancera la gloire de Sam & Dave, surnommés "The Double Dynamite".
5/Otis Redding : « The Dock Of The Bay » - 1968
Arrivé par hasard aux studios Stax, accompagnant comme chauffeur Johnny Jenkins et les Pinetoppers venus de Géorgie enregistrer un instrumental dans la foulée du succès de «Green Onions», Otis, à peine 21 ans, supplie les ingénieurs du son de lui laisser sa chance et d’enregistrer un morceau. C’est le choc : sa voix inimitable et magique, son sens du rythme insaisissable laisse tout le monde bouche bée. Mais le destin n’est pas de cet avis, et Otis, une des plus belles voix de la soul music de tous les temps, meurt à 27 ans dans un accident d’avion, marquant une immense perte pour Stax et le monde de la musique. Sorti quelques temps après sa mort, « The Dock Of The Bay » est son plus gros succès à ce jour.
6/ Isaac Hayes : « Walk On By » - 1969
Début 1968, Stax est au cœur d'émeutes qui transforment Memphis en poudrière, après la mort accidentelle de deux éboueurs noirs qui déclenche de vives protestations. Le 4 avril, l'assassinat de Martin Luther King, qui s’est rendu à Memphis pour soutenir le mouvement de contestation, met la ville à feu et à sang. Déjà dévasté par la disparition brutale d’Otis Redding, Stax transforme son logo en main noire qui claque des doigts, signe de son engagement politique. Isaac Hayes, perturbé, reclus dans le silence pendant un an, enregistre « Hot Butter Soul » son premier album solo, avec l’incroyable « Walk On By », titre ovni pour l’époque, long de 17 minutes, qui marquera l’ADN de la soul music à tout jamais.
Le groupe The Bar-Kays a accompagné Isaac sur son disque.
La suite du musée nous présente sa collection de 800 disques 45 tours et de 300 albums 33 tours.
Du sol au plafond, une papier peint très psychédélique !
Avec des stations d'écoute diffusant 300 tubes Stax.
Puis nous découvrons la reconstitution à l'identique de la "Control Room", régie située à l'emplacement de l'ancienne scène du théâtre...
...avec une console d'enregistrement utilisée par tous les artistes listées ci-dessus.
La bibliothèque des bandes magnétiques originales qui avaient été saisies par la justice au moment de la faillite... Jim Steward perdra d'ailleurs pratiquement tout ce qu'il aura gagné dans l'entreprise !
Et le studio A, qui avait conservé la pente de la salle de spectacle, ce qui contribuait à amortir le son, une façon d'essayer de contrôler l'acoustique de la pièce à peu de frais qui deviendrait finalement une caractéristique du son Stax.
Orgue, guitares, cuivres et batterie, instruments liés à la musique Soul, sont exposés dans cette salle. Ici, l'orgue Hammond de Booker T. Jones que l'on entend sur "Green Onion".
La batterie de Al jackson Jr,un des membres fondateurs du groupe Booker T. & the M.G.'s, surnommé « le métronome humain » dont le jeu, basé notamment sur le contretemps, a contribué à définir le son de la soul de Memphis. Après Stax, il rejoint le groupe du chanteur "Al Green" pour lequel il co-écrit la chanson "Let's Stay Together", avant de mourir assassiné en 1975.
Toutes deux signées, la guitare de Steve Crooper et la basse de Duck Dunn, deux musiciens des MGs qui ont rejoint les Blues Brothers après la faillite de Stax.
La trompette de Wayne Jackson (qui fut guide privé dans la musée) et le saxophone baryton de Floyd Newman, musiciens des Bar Kays et des Memphis Horns.
On termine la visite par un hommage à Isaac Hayes qui a permis à Stax de remonter la pente après la mort de son artiste phare, Otis Redding, en 1967.
Isaac Hayes est un musicien surdoué qui, après la soul du sud, invente la soul symphonique, puis la bande-son urbaine de la "Blaxploitation" comme dans le film "Shaft" (pour laquelle il a reçu cet Oscar) et, enfin, la future imagerie du hip-hop - crâne chauve et corps musclé couvert d’or. Avec lui et ses camarades, les chaînes des esclaves sont devenues celles d’une libération symbolique...
Admirez les talons !
Clou du spectacle, la Cadillac Eldorado bleu paon d'Isaac, qui tourne sur elle-même au son du thème de Shaft... Achetée pour 26 000 $ (environ 160 000 $ actuels !) dans le cadre de son accord renégocié avec Stax en 1972, luxueusement équipée d'un mini-bar et d'une télé, avec des garnitures extérieures plaquées or 24 carats et de la fourrure blanche en guise de tapis de sol... très pratique pour les balades à la campagne !
Diaporama : Cadillac Eldorado d'Isaac Hayes
Bref une visite passionnante baignée dans le fameux "son Stax" qu'on nomme aussi « Southern Soul », « Deep Soul », ou encore « Memphis Sound »... un mix de Blues et de Gospel, de Rythm'n'Blues avec une touche de country, "une musique brute qui sortait des tripes de nos églises au fin fond du Mississippi" comme le dira Al Bell, co-propriétaire de Stax dans les dernières années.
Booker T § the MGs étaient des fans absolus des Beatles. Il sont allés jusqu'à enregistrer une version instrumentale d'Abbey Road qu'ils ont intitulée "Mc Lemore Avenue" en mimant la pochette initiale! Les artistes Stax ont même sorti en 2008 une compilation de reprises "Stax Does The Beatles". Les Beatles étaient eux-mêmes fins connaisseurs des Stax Studios qu'ils avaient pensé louer pour leur album Revolver... mais cela ne se fit jamais.
Eddy Mitchell a rencontré Otis Redding à Paris en 1967 peu avant sa mort. Son titre "Otis" est une reprise d'une chanson de Redding "Hard to handle".
Ils avaient des projets ensemble dont un disque avec, sur la pochette, Otis tenant un tigre en laisse...
Otis devait produire la séance d'Eddy à Memphis, c'était un accord entre Barclay et Stax, puisque Barclay distribuait Stax en France. Mais cela n'a pas eu lieu parce qu'Otis était en tournée européenne quand Eddy est allé enregistrer aux USA...
Dick Rivers était un grand fan d'Elvis, il a même choisi son pseudo d'après le personnage que jouait Elvis dans son film "Loving You".
Il a aussi rendu hommage à Otis Redding en enregistrant le titre "M. Pitiful".
Il raconte : "J'ai enregistré à Memphis avec deux musiciens disparus ensuite dans l'accident avec lui. Une séance incroyable, un souvenir inoubliable. Je réalisai un vieux rêve. Mais je ne recommencerai pas : les musiciens de Stax sont de formidables artistes de R'n'B mais ils ne font que ça. Ils ne savent pas lire la musique. Il m'a fallu soixante‑neuf heures pour enregistrer cinq titres !"